Une étude récente publiée dans JAMA évalue le potentiel des biomarqueurs plasmatiques de la maladie d’Alzheimer (MA) et des facteurs de risque cardiométaboliques pour prédire le risque d’autres types de démence.
Étude: Modifications des biomarqueurs sanguins de la maladie d’Alzheimer et associations avec la démence incidente toutes causes confondues. Crédit photo : Aquarious Studio / Shutterstock.com
Sommaire
Diagnostic précoce de la démence
Le diagnostic de la maladie d’Alzheimer et d’autres formes de démence est souvent posé après l’apparition des symptômes, moment auquel l’accumulation de modifications cérébrales pathologiques limite la capacité à traiter efficacement ces maladies. Il est donc urgent d’identifier des biomarqueurs plasmatiques capables de dépister la pathologie de la maladie d’Alzheimer et la neurodégénérescence, en particulier chez les patients présymptomatiques.
La présence de troubles cardiométaboliques chez les adultes d’âge moyen est un facteur de risque connu de démence. Cependant, on ne sait pas encore clairement dans quelle mesure les niveaux altérés de biomarqueurs plasmatiques associés à ces maladies peuvent soutenir la prédiction de troubles neurologiques.
Bien que plusieurs études aient examiné le potentiel des biomarqueurs plasmatiques pour le diagnostic précoce de la démence, elles ont été limitées en raison de leur conception transversale, de leurs populations d’étude homogènes et du manque d’analyses prenant en compte l’impact potentiel des biais d’attrition ou de sélection.
Afin de surmonter les limites associées à ces études, les chercheurs de l’étude actuelle ont examiné les niveaux de biomarqueurs plasmatiques, seuls et en association avec des facteurs de risque cardiométaboliques, dans une population diversifiée sur plusieurs décennies pour établir la validité et l’utilité de ces biomarqueurs dans la prédiction du risque de démence.
À propos de l'étude
Toutes les données proviennent de l'étude Atherosclerosis Risk in Communities (ARIC), qui a porté sur 1 525 participants. L'âge moyen des participants à l'étude lors du premier prélèvement de plasma était de 58 ans et de 76 ans lors du deuxième.
Les niveaux de marqueurs spécifiques de la MA, y compris le rapport amyloïde-β 42 à amyloïde-β 40 (Aβ42:Aβ40) et la protéine tau phosphorylée à la thréonine 181 (p-tau181), ainsi que les marqueurs de neurodégénérescence neurofilament léger (NfL) et protéine acide fibrillaire gliale (GFAP), ont été mesurés dans tous les échantillons de plasma.
Les participants à l’étude ont été suivis jusqu’à ce qu’ils atteignent un âge moyen de 81 ans. Entre le 1er janvier 2012 et le 31 décembre 2019, de nouveaux cas de démence, toutes causes confondues, ont été identifiés. Les facteurs de risque de démence, notamment l’hypertension, le diabète, les lipides, les maladies coronariennes, le tabagisme et l’activité physique, ont également été évalués pour leur association temporelle avec les biomarqueurs plasmatiques.
Qu'a montré l'étude ?
Environ 60 % des participants à l'étude étaient des femmes et 26 % étaient noirs. On a recensé 252 nouveaux cas de démence, ce qui représente 16,5 % de la cohorte de l'étude. Un diagnostic de démence était plus susceptible de survenir chez les participants à l'étude présentant de faibles taux plasmatiques d'Aβ42:Aβ40 et des taux plus élevés de p-tau181, de NfL et de GFAP.
Pour ceux qui portaient l'apolipoprotéine E epsilon 4 (APOEε4), le taux de changement de ces biomarqueurs était plus élevé que pour les non-porteurs. Pour NfL et GFAP, l'association avec une démence d'apparition récente à la fin de la vie était plus forte qu'à la cinquantaine, indépendamment de APOEStatut ε4.
Les participants à l’étude souffrant d’hypertension artérielle et de diabète présentaient des taux plus élevés de NfL et de GFAP, dépassant l’augmentation attendue pour chaque décennie. Comparativement aux personnes souffrant d’hypertension, les taux de NfL ont augmenté plus lentement et les taux de GFAP ont doublé chez les personnes atteintes de diabète.
Les biomarqueurs de la maladie d'Alzheimer à l'âge mûr étaient associés à un risque accru de démence toutes causes confondues à un âge avancé. Un risque accru de 11 % dans cette forme de démence a été observé pour chaque réduction d'un écart type (1-SD) de l'Aβ42:Aβ40, tandis que chaque augmentation d'un écart type (1-SD) des niveaux de p-tau181 augmentait le risque de 15 %.
Tous les biomarqueurs de la MA étaient associés à un risque accru de démence tardive, l'association la plus significative étant observée avec la NfL.
Une combinaison des quatre marqueurs en fin de vie a amélioré la capacité de prédiction de la démence par rapport à l'utilisation d'un biomarqueur seul. Cependant, la combinaison de biomarqueurs en fin de vie avec des données démographiques a permis d'obtenir la plus grande capacité de discrimination, indépendamment de l'utilisation de APOEε4.
Conclusions
Les biomarqueurs plasmatiques spécifiques de la MA à l’âge mûr prédisent un risque accru de démence toutes causes confondues à la fin de la vie, alors que les marqueurs de neurodégénérescence à l’âge mûr ne sont pas associés à la même prévisibilité. À la fin de la vie, les marqueurs spécifiques de la MA et les marqueurs neurodégénératifs sont tous deux associés au risque de démence à la fin de la vie. Les meilleures performances en matière de prédiction de la démence ont été observées lorsque les biomarqueurs de fin de vie et les données démographiques ont été combinés.
Les résultats de l’étude apportent des informations cruciales sur la recherche de biomarqueurs de la maladie d’Alzheimer en évaluant la trajectoire de quatre biomarqueurs plasmatiques clés et la manière dont les variations des niveaux de ces protéines fluctuent lorsque d’autres facteurs de risque de démence sont pris en compte. Néanmoins, des recherches futures devraient être nécessaires pour confirmer ces résultats, car les marqueurs de neurodégénérescence pourraient être utilisés pour surveiller l’efficacité des traitements visant à réduire les facteurs de risque vasculaire associés à ces pathologies.