Le processus d'identification de médicaments candidats prometteurs à petites molécules ciblant les points de contrôle du cancer pourrait devenir plus rapide et plus intelligent grâce au dépistage virtuel, selon les chercheurs de Weill Cornell Medicine.
Les inhibiteurs de points de contrôle sont un type d’immunothérapie qui traite le cancer en relâchant les freins des cellules immunitaires, afin qu’elles soient libérées pour attaquer les cellules cancéreuses. Actuellement, tous les inhibiteurs de points de contrôle approuvés sont de grosses protéines fabriquées en laboratoire, appelées anticorps monoclonaux, qui doivent être perfusées dans la circulation sanguine. Ils bloquent la liaison des protéines de point de contrôle avec leurs protéines partenaires, empêchant ainsi le signal « off » qui empêche l’activation des cellules T immunitaires.
Notre recherche représente une avancée remarquable dans le domaine de l'immunothérapie du cancer, qui pourrait conduire à une alternative prometteuse aux traitements basés sur les anticorps monoclonaux.
M. Moustafa Gabr, auteur supérieur, professeur adjoint de chimie en radiologie
Les résultats publiés le 16 octobre dans Science Advances démontrent un moyen de cribler virtuellement des millions de composés pour trouver de petites molécules susceptibles de se lier à des points de contrôle permettant au système immunitaire de lancer une attaque contre le cancer. Les petites molécules présentent un avantage car elles sont généralement biodisponibles par voie orale pour une administration plus facile, un dosage adapté et une meilleure observance du patient. Ils peuvent également pénétrer plus efficacement dans les tumeurs en raison de leur plus petite taille.
Le premier auteur de l'article est le Dr Somaya Abdel-Rahman, professeur adjoint de pharmacie au département de chimie médicinale de l'Université de Mansoura, en Égypte.
Trouver la bonne personne
La difficulté de cibler les protéines des points de contrôle immunitaires réside dans leurs surfaces plates et dynamiques qui ne se lient pas facilement aux petites molécules. Pour résoudre ce problème, les Drs Gabr et Abdel-Rahman se sont penchés sur les structures co-cristallisées des points de contrôle immunitaires liés aux anticorps monoclonaux.
Les chercheurs ont utilisé un outil informatique qui identifie les sites d’interaction clés au sein des interfaces protéine-protéine des protéines de point de contrôle liées aux anticorps monoclonaux. Cela les a aidés à générer des cartes « pharmacophores », des modèles tridimensionnels qui montrent les caractéristiques essentielles des interactions de liaison. Ils ont ensuite calculé des propriétés telles que l'étroitesse de liaison des molécules et les scores de « pharmacobilité », qui sont essentiels à la conception rationnelle d'inhibiteurs à petites molécules.
Cette analyse a guidé le criblage virtuel d’une base de données comprenant des millions de petites molécules disponibles dans le commerce. Les résultats potentiels identifiés imitent les interactions de liaison des anticorps monoclonaux avec leurs points de contrôle cibles.
Valider des composés prometteurs
Les composés les plus prometteurs ont ensuite été testés pour confirmer l’affinité de liaison (l’étroitesse de l’interaction de la molécule avec la protéine du point de contrôle) et la spécificité (la capacité du composé à se lier uniquement à la cible prévue). Ils ont également testé les composés dans les cellules pour évaluer l’impact fonctionnel des petites molécules sur l’activité des points de contrôle immunitaire.
Cette étude a identifié une molécule appelée MG-T-19, qui inhibe fortement TIM-3, un récepteur de point de contrôle exprimé par une grande variété de cellules immunitaires. TIM-3 est un point de contrôle inhibiteur qui, lorsqu'il est bloqué, peut revigorer les réponses des lymphocytes T contre les tumeurs.
Un autre composé appelé MG-V-53 a été identifié comme un inhibiteur de VISTA ayant une activité antitumorale in vivo. VISTA est un autre point de contrôle inhibiteur impliqué dans l’évasion immunitaire des tumeurs.
« Les petites molécules identifiées dans cette étude présentent non seulement de fortes affinités de liaison, mais montrent également une activité prometteuse dans des modèles murins, notamment en réduisant le volume des tumeurs. Cela suggère leur potentiel de développement thérapeutique », a déclaré le Dr Gabr.
Les études futures se concentreront sur l’optimisation des composés les plus performants pour une utilisation clinique, sur l’exploration de leurs effets synergiques dans les thérapies combinées et sur l’extension de cette approche de criblage unique à des cibles immunitaires supplémentaires.
« Cette approche a le potentiel d'élargir le répertoire des thérapies anticancéreuses disponibles, d'améliorer les résultats pour les patients et d'ouvrir de nouvelles voies de recherche et de développement », a conclu le Dr Gabr.