DILI est largement classé en types intrinsèques et idiosyncrasiques. Les hépatotoxines intrinsèques, telles que l'APAP, provoquent des lésions dose-dépendantes, tandis que le DILI idiosyncrasique implique des interactions immunitaires et métaboliques complexes qui restent mal comprises. Des études mécanistiques sur les hépatotoxines intrinsèques ont révélé que le stress oxydatif et le dysfonctionnement mitochondrial étaient des facteurs clés des blessures. Historiquement, la LPO et la génération de radicaux libres catalysées par le fer étaient essentielles à la compréhension du DILI, mais l'attention s'est déplacée vers l'apoptose à la fin du 20e siècle.
La découverte de la ferroptose- ; une forme régulée de mort cellulaire caractérisée par une déplétion en glutathion, une inactivation de la glutathion peroxydase 4 (GPx4) et une propagation dépendante du fer de la LPO- ; a renouvelé l’intérêt pour les mécanismes de mort cellulaire non apoptotiques. Bien qu’initialement étudiée dans le cancer, la ferroptose est de plus en plus impliquée dans diverses maladies, notamment les lésions hépatiques. Cependant, les solides défenses antioxydantes du foie, notamment le glutathion (GSH) et la vitamine E, remettent en question l'applicabilité généralisée de la ferroptose comme mode principal de mort cellulaire dans le DILI.
Sommaire
Mécanismes de la ferroptose
La ferroptose a été identifiée pour la première fois dans des cellules cancéreuses mutantes RAS exposées à l'érastine et à des composés apparentés, qui inhibent l'antiporteur cystine/glutamate (système Xc-) et altèrent la synthèse du GSH. La déplétion en glutathion qui en résulte perturbe l’activité du GPx4, empêchant la détoxification des hydroperoxydes lipidiques et favorisant la LPO. Cette cascade conduit au dysfonctionnement cellulaire et à la mort. Les caractéristiques uniques de la ferroptose (dépendance au fer, génération de ROS et propagation de la LPO) la distinguent de l'apoptose et de la nécrose.
Dans les hépatocytes, la ferroptose est confrontée à des contraintes physiologiques dues aux systèmes antioxydants multicouches du foie. Ceux-ci incluent la séquestration du fer médiée par la ferritine, l’activité GPx4 et des niveaux élevés de vitamine E dans les membranes. La revue souligne la nécessité d'évaluer de manière critique si la ferroptose contribue à la mort des hépatocytes dans des conditions normales ou si elle ne devient pertinente que dans des scénarios de déplétion sévère en antioxydants ou de surcharge aiguë en fer.
Réévaluer la peroxydation lipidique et le stress oxydatif
La relation entre l'hépatotoxicité de la LPO et de l'APAP a été controversée. Les premières études associaient un surdosage d'APAP à une LPO sévère, en particulier chez les animaux nourris avec un régime déficient en vitamine E. Cependant, des recherches ultérieures ont démontré une LPO minimale dans des conditions normales, même dans des modèles de lésions hépatiques graves. Au lieu de cela, le dysfonctionnement mitochondrial est apparu comme un facteur central de l’hépatotoxicité.
Le métabolite réactif N-acétyl-p-benzoquinone imine (NAPQI), formé au cours du métabolisme de l'APAP, épuise le GSH et forme des adduits protéiques, en particulier dans les mitochondries. Cela déclenche le stress oxydatif, active la kinase N-terminale c-Jun (JNK) et perturbe l'intégrité mitochondriale.
Le peroxynitrite, un puissant oxydant formé par la réaction du superoxyde mitochondrial et de l'oxyde nitrique, joue un rôle clé dans les dommages oxydatifs. Des études montrent que le peroxynitrite intervient dans la nitration des protéines, les dommages à l'ADN et le dysfonctionnement mitochondrial, plutôt que la LPO, comme principal mécanisme cytotoxique. Ces résultats remettent en question l'hypothèse selon laquelle la ferroptose, caractérisée par une LPO étendue, serait le mode dominant de mort cellulaire dans l'hépatotoxicité induite par l'APAP dans des conditions normales.
Le rôle des inhibiteurs de la ferroptose
Les auteurs discutent de l'utilisation d'inhibiteurs de la ferroptose, tels que la ferrostatine-1, pour évaluer la pertinence de la ferroptose dans les lésions hépatiques. La ferrostatine-1 et ses analogues ont montré une efficacité incohérente dans les modèles APAP, en particulier dans des conditions de LPO limitée. Des inhibiteurs plus puissants, comme l'UAMC-3203, présentent des effets hors cible, tels qu'une régulation négative de la signalisation JNK, ce qui complique leur interprétation. La revue souligne qu'une augmentation significative de la LPO (10 à 50 fois supérieure à la valeur initiale) est nécessaire pour que la ferroptose joue un rôle biologiquement pertinent dans les lésions hépatiques.
Implications plus larges et autres hépatotoxines
Au-delà de l'APAP, plusieurs médicaments et produits naturels ont été étudiés pour leur potentiel à induire la ferroptose. Le méthotrexate, un médicament anticancéreux et anti-inflammatoire, a été associé à la LPO et à la ferroptose médiées par la ferritinophagie. Cependant, les niveaux de LPO restent modestes et les blessures sont légères. De même, la rifampicine et l'isoniazide, utilisés pour traiter la tuberculose, présentent des caractéristiques similaires à celles de la ferroptose, telles que la réduction de GPx4 et la régulation positive de l'ACSL4, mais les preuves définitives de causalité font défaut. Des composés à base de plantes comme Epimedium koreanum et la toosendanine ont également été associées à la ferroptose, bien que leurs effets soient modérés et souvent corrélatifs.
Discussion
Les auteurs soulignent une augmentation exponentielle des publications attribuant le DILI à la ferroptose. Cependant, de nombreuses études s'appuient sur des marqueurs indirects, tels que la déplétion en LPO ou en GPx4, sans établir de causalité. Les systèmes de défense du foie, notamment le GSH, la ferritine et la vitamine E, empêchent généralement un excès de LPO, limitant ainsi la ferroptose dans des conditions normales. Des scénarios tels qu'une carence en vitamine E ou une surcharge aiguë en fer peuvent accroître la sensibilité à la LPO et à la ferroptose, mais de telles conditions sont rares dans la pratique clinique.
Conclusions
La ferroptose représente un mécanisme convaincant mais dépendant du contexte dans DILI. Bien qu'il puisse contribuer à des lésions hépatiques dans des conditions spécifiques de compromission des antioxydants ou de surcharge en fer, il est peu probable qu'il joue un rôle dominant dans l'hépatotoxicité induite par l'APAP dans des conditions normales. La revue souligne la nécessité d’une validation expérimentale rigoureuse et d’une compréhension nuancée des mécanismes de mort cellulaire dans les maladies du foie. Les recherches futures devraient se concentrer sur la quantification des seuils de LPO et sur l'identification des conditions dans lesquelles la ferroptose devient pathologiquement pertinente.