Les mécanismes du cerveau permettant de réparer les blessures causées par un traumatisme ou des maladies dégénératives ne sont pas encore connus en détail. Aujourd'hui, une étude de l'Université de Barcelone décrit une nouvelle stratégie basée sur la thérapie par cellules souches qui pourrait améliorer la régénération neuronale et la neuroplasticité lorsque cet organe vital est endommagé. Les résultats révèlent que l’utilisation du facteur neurotrophique dérivé du cerveau (BDNF), associé à des thérapies cellulaires à base de cellules souches, pourrait aider au traitement des maladies neurodégénératives ou des lésions cérébrales.
L'étude, publiée dans Revue internationale des sciences moléculairesest dirigé par le professeur Daniel Tornero et la chercheuse Alba Ortega, de la Faculté de médecine et des sciences de la santé et de l'Institut des neurosciences de l'Université de Barcelone (UBneuro). L'étude implique la participation décisive d'un groupe d'étudiants de l'UB qui ont reçu l'une des médailles d'or du concours international de biologie synthétique iGEM 2024, le plus important concours international de biologie synthétique destiné aux jeunes chercheurs.
Combiner la thérapie cellulaire avec la production de BDNF
Le BDNF est une protéine synthétisée principalement dans le cerveau et qui joue un rôle clé dans le développement neuronal et la plasticité synaptique. Plusieurs études ont décrit son potentiel à favoriser la survie et la croissance neuronales, découvertes désormais étendues par la nouvelle étude.
Les résultats indiquent que le BDNF peut favoriser la maturation et augmenter l’activité des neurones générés en laboratoire à partir de cellules cutanées de donneurs. Les cellules de la peau doivent d’abord être reprogrammées pour devenir des cellules souches pluripotentes induites (iPSC), puis différenciées pour obtenir des cultures neuronales. »
Daniel Tornero, Département de biomédecine de l'UB et Zone CIBER pour les maladies neurodégénératives (CIBERNED)
De cette manière, l’étude combine la thérapie cellulaire avec la production de BDNF dans les mêmes cellules. Cette étude confirme les effets bénéfiques de ce facteur de croissance dans les cultures neuronales dérivées de cellules souches humaines, ces mêmes cellules qui sont utilisées en thérapie cellulaire pour traiter, par exemple, les accidents vasculaires cérébraux dans des modèles animaux.
« Cette stratégie est appliquée à un niveau expérimental pour concevoir des thérapies cellulaires et générer des modèles de laboratoire pour aider à étudier les maladies cérébrales », explique Tornero. Lorsque ces cellules progénitrices neurales (NPC) sont modifiées pour surexprimer continuellement la protéine BDNF, « on obtient des cultures neuronales plus matures et actives, sans altérer l'organisation normale de leurs connexions ni les réseaux fonctionnels », explique la chercheuse Alba Ortega.
L'étude se concentre sur les aspects plus fonctionnels de la régénération neuronale, tels que l'activité neuronale et la génération d'axones, qui sont directement impliqués dans l'intégration des cellules transplantées dans le cerveau.
« De plus, les cellules qui produisent le BDNF sont capables d'attirer plus efficacement les axones, les extensions qui permettent la communication entre les neurones. Cet effet de chimio-attraction serait lié à la production de ce facteur », explique le chercheur.
La capacité du BDNF à attirer les axones en croissance a été décrite précédemment. Aujourd’hui, l’équipe montre cet effet pour la première fois dans des neurones dérivés de cellules souches humaines à l’aide d’un système de puce microfluidique. Cette technologie innovante — avec deux chambres isolant des populations de neurones ayant ou non la capacité de produire du BDNF — permet d'augmenter des populations de neurones communiquant par de petits canaux et ainsi d'observer précisément comment ils interagissent entre eux.
« Les cellules qui produisent le BDNF génèrent un gradient de concentration dans ces canaux, qui, selon nous, guide et facilite la formation de projections neuronales dans une direction spécifique », explique l'étudiant Santiago Ramos, représentant le groupe d'étudiants qui ont apporté une perspective innovante à la conception conceptuelle et expérimentale de l'étude.
Complétant la capacité naturelle du cerveau à se régénérer
Les maladies neurodégénératives et les lésions neuronales, de plus en plus fréquentes dans la population, constituent l’un des défis majeurs des systèmes de santé. La capacité de régénération endogène du cerveau humain étant très limitée, les lésions ne guérissent que partiellement et les patients atteints se retrouvent souvent avec des séquelles motrices et cognitives. Dans ce contexte, il existe un besoin urgent de concevoir des stratégies complétant ces mécanismes cérébraux endogènes par des thérapies à base de cellules souches humaines afin de favoriser la réparation neuronale, l’intégration fonctionnelle et une récupération plus efficace.
À cet égard, l’équipe prévoit de transférer ces résultats à des modèles animaux, une ligne de recherche développée depuis un certain temps dans ce laboratoire pour améliorer la thérapie par cellules souches humaines dans les lésions ischémiques d’accident vasculaire cérébral affectant le cortex cérébral.
L’application des avancées précliniques chez les patients marquera un tournant dans le traitement de nombreuses maladies neurodégénératives. Cependant, de nombreux obstacles subsistent pour mettre en œuvre des thérapies basées sur les cellules souches et éviter les effets secondaires potentiels (génération de tumeurs, etc.). Certains essais cliniques internationaux basés sur la transplantation de cellules souches pour le traitement des patients atteints de la maladie de Parkinson (au Japon, en Suède et aux États-Unis) donnent des résultats prometteurs.
« Même s'il existe de nombreux défis, les progrès réalisés dans les essais cliniques sur la maladie de Parkinson montrent que nous sommes plus près que jamais d'appliquer ces thérapies en toute sécurité aux patients victimes d'un accident vasculaire cérébral ou d'autres maladies neurodégénératives », concluent les experts.

























