Chaque année, durant la dernière semaine d’octobre, une campagne mondiale sensibilise à l’épidermolyse bulleuse, une maladie génétique rare et extrêmement invalidante et douloureuse. Pour les enfants qui en sont atteints, un simple frottement peut suffire à provoquer une plaie. À cette occasion, URGO Medical, spécialiste du traitement des plaies, et sa fondation d’entreprise reviennent sur 25 ans d’engagement aux côtés des soignants, des associations et des familles, dans la lutte contre cette pathologie méconnue.
Avec :
- Le Dr Serge Bohbot, Directeur des affaires médicales, URGO Medical
- Maryline Farys, Responsable de l’éducation médicale internationale, URGO Medical
- Charlotte Tocanne, Coordinatrice des projets cicatrisation, Fondation URGO
Sommaire
Qu’est-ce que l’épidermolyse bulleuse et comment se manifeste-t-elle ?
Dr Serge Bohbot : L’épidermolyse bulleuse est une maladie génétique rare, qui atteint une personne pour 100 000 naissances. Elle se manifeste par une extrême fragilité de la peau, qui se déchire ou génère des cloques/bulles au moindre contact. Un simple oreiller peut blesser durant le sommeil ; parfois même, les frottements entre les doigts, lorsque la main se ferme, peuvent provoquer des plaies ; même les coutures des vêtements peuvent générer des lésions cutanées.
On parle souvent d’« enfants papillons » : leur peau, aussi fragile qu’une aile de papillon, peut se blesser au moindre contact. La maladie n’est pas contagieuse et demeure mal connue, ce qui rend la sensibilisation indispensable – notamment à l’école.
Les formes graves s’accompagnent souvent d’atteintes internes, en particulier du système digestif, entraînant des troubles nutritionnels et du développement. Dans les formes sévères, à l’âge adulte, certains patients ne dépassent parfois pas les 1,30 m et les 25 kg. Dans ces formes les plus graves, les nouveau-nés présentent déjà des plaies à la naissance, et auront une espérance de vie limitée à l’adolescence ou à l’état d’adulte jeune.
Existe-t-il un traitement contre l’épidermolyse bulleuse aujourd’hui ?
Maryline Farys : La recherche avance. La thérapie génique présente des résultats prometteurs, ouvrant de nouvelles perspectives pour les patients. Un traitement de ce type a d’ailleurs été récemment autorisé au Japon. Il ne concerne cependant que certaines formes spécifiques d’épidermolyse bulleuse, et son coût – plusieurs dizaines de milliers d’euros – le rend aujourd’hui inaccessible pour la grande majorité des patients.
Pour l’heure, le traitement reste essentiellement symptomatique : il vise à protéger les plaies pour limiter la douleur notamment lors des changements de pansements, souvent quotidiens, et prévenir les infections.
Comment URGO s’est-il engagé dans la lutte contre l’épidermolyse bulleuse ?
Dr Serge Bohbot : Avant les années 2000, les familles d’enfants atteints l’épidermolyse bulleuse n’avaient que peu de solutions à disposition. Les pansements gras classiques, couramment utilisés, étaient mal tolérés car, en séchant, ils collaient à la peau, et leur retrait provoquait des douleurs, des saignements, voire de nouvelles lésions. Ces soins très lourds, le plus souvent quotidiens, étaient souvent réalisés par les parents, faute de personnel soignant formé ou disponible. La famille qui se retrouve ainsi en première ligne pour ces soins voit sa vie être bouleversée, à tous niveaux.
En 2001, lors d’un congrès de dermatologie, j’ai rencontré les grands-parents d’un enfant atteint l’épidermolyse bulleuse. Leur témoignage est à l’origine de mon engagement sur cette pathologie. J’ai initié une étude clinique à l’hôpital Saint-Louis à Paris, avec le Dr Blanchet-Bardon, laquelle a inclus 20 patients, enfants et adultes – la plus importante jamais réalisée à ce jour, compte tenu de la rareté de cette pathologie.
Nous avons testé des pansements de nouvelle génération, les « interfaces non adhérentes », que nous venions de concevoir. Ces pansements conformables et non traumatisants au retrait, protègent la plaie sans coller à la peau, laissant passer les exsudats, et peuvent rester en place plusieurs jours.
Les résultats ont été extrêmement positifs, au-delà de toute espérance. Les soins sont devenus quasiment indolores, plus simples, mieux tolérés, avec une réduction du risque d’infection. Pouvoir retirer un pansement sans douleur et espacer les soins transforme radicalement le quotidien d’un enfant atteint d’épidermolyse bulleuse — et de sa famille. Une mère nous a confié, très émue : « Vous avez changé notre vie ». Toute l’équipe était en larmes.
Maryline Farys : Depuis, les dispositifs ont encore été améliorés. Nous avons conçu des interfaces encore plus conformables, adaptées aux zones difficiles à traiter, comme les doigts ou les plis cutanés. Ces pansements peuvent être découpés à la main et ajustés à la morphologie de chaque patient.
En dehors des dispositifs médicaux, quelles actions mène URGO en faveur des patients atteints d’épidermolyse bulleuse ?
Maryline Farys : Nous soutenons les associations de patients, en France et à l’étranger, depuis plus de 25 ans, en particulier DEBRA, la plus active d’entre-elles, à travers la participation aux manifestations organisées par l’association, un appui logistique, la réalisation de formations et la rédaction de guides pratiques. Ces derniers abordent des sujets concrets : découpe des interfaces, protection des zones difficiles d’accès, organisation des soins ou préparation à des moments sensibles comme la rentrée scolaire.
Dr Serge Bohbot : URGO accompagne également plus de dix associations hors de France, notamment au Brésil et au Vietnam. Des webinaires multilingues sont organisés, et des experts interviennent pour former les équipes soignantes locales.
Maryline Farys : L’entreprise participe également à la conférence mondiale organisée généralement tous les 2 ans par DEBRA. La prochaine se tiendra à São Paulo au Brésil, du 20 au 22 janvier 2026, et réunira de nombreuses associations, des soignants et des familles.
Cet engagement s’inscrit, sur la durée, dans une démarche de responsabilité sociétale.
Charlotte Tocanne : En 2015, Debra Chine, association locale de soutien aux familles touchées par l’épidermolyse bulleuse, voyait le jour avec le soutien de la Fondation URGO.
Dix ans plus tard, elles célèbrent une décennie de partenariat, symbole d’un engagement durable et profondément humain.
Présente dans cinq pays en 2025 — le Brésil, le Vietnam, l’Espagne, la Pologne et la Chine — la Fondation URGO agit à travers des programmes de formation, des enquêtes sur la qualité de vie et des campagnes de sensibilisation, afin de mieux faire connaître cette pathologie rare et d’en améliorer la prise en charge.
Créée en 2010 à la suite d’un appel de l’hôpital Necker, centre de référence pour les maladies cutanées rares comme l’épidermolyse bulleuse, la Fondation URGO a depuis élargi son action à d’autres enjeux de santé publique comme la douleur liée à l’endométriose ou encore les premiers soins aux mères et aux bébés en Afrique avec la Croix Rouge. Son engagement repose sur une conviction forte : la sensibilisation, la formation et le soutien local sont les clés pour faire progresser la prise en charge et le bien-être des patients.
Un engagement complémentaire à celui d’Urgo Medical, au service de l’intérêt général.
Pouvez-vous nous expliquer ce que représente la campagne Inside Out et pourquoi elle est importante ?
Maryline Farys : Chaque année, à l’occasion de la semaine mondiale de sensibilisation à l’épidermolyse bulleuse, DEBRA International lance une grande campagne de communication. Cette année, le public est invité à porter ses vêtements à l’envers [INSIDE OUT]. Ce geste symbolique fait écho au vécu des patients : comme les coutures peuvent les blesser, beaucoup choisissent de retourner leurs vêtements. L’objectif est de surprendre, de piquer la curiosité, et ainsi d’ouvrir le dialogue autour de la maladie. URGO Medical relaie cette campagne avec conviction, auprès de nos collaborateurs comme du grand public.
Charlotte Tocanne : Ce renversement rend visible l’invisible : c’est une manière d’inviter à regarder l’épidermolyse bulleuse en face, et à ne plus détourner le regard.
























