Nicholas A. Marston, MD, MPH, du groupe d'étude TIMI et du centre cardiovasculaire Carl J. et Ruth Shapiro du Brigham and Women's Hospital, est l'auteur correspondant d'un article publié dans Nature Medicine, « Hématopoïèse clonale, événements cardiovasculaires et bénéfice du traitement chez 63 700 individus issus de cinq essais randomisés TIMI ».
Comment résumeriez-vous votre étude pour un public profane ?
L'hématopoïèse clonale à potentiel indéterminé (CHIP) est une maladie qui favorise la multiplication des cellules souches sanguines dans l'organisme et augmente le risque de maladie cardiaque et d'accident vasculaire cérébral chez les patients. Elle est causée par des mutations génétiques spécifiques qui peuvent survenir avec l'âge, souvent chez les patients de plus de 60 ans.
Notre équipe a analysé les données de 63 700 patients issus de cinq essais cliniques différents sur les traitements des maladies cardiaques. Sur une période de deux ans, nous avons observé combien de patients avec et sans CHIP avaient des problèmes cardiaques, tels que des crises cardiaques, des accidents vasculaires cérébraux et des interventions cardiaques. Nous avons constaté que le CHIP avait la plus forte association avec la première crise cardiaque et n'était pas associé à des événements cardiaques récurrents. Nous avons également constaté que les patients atteints de CHIP bénéficiaient d'une gamme de thérapies cardiaques dans une mesure similaire à ceux sans CHIP.
Quelles lacunes en matière de connaissances votre étude contribue-t-elle à combler ?
Cette analyse comble deux lacunes majeures dans les connaissances. La première est la question de savoir quelles populations pourraient bénéficier de la connaissance de leurs mutations CHIP. Nous avons constaté qu’une population de prévention primaire, c’est-à-dire les personnes n’ayant jamais subi de crise cardiaque, semble présenter le risque le plus élevé associé à la mutation CHIP. La présence de mutation CHIP chez les personnes ayant déjà subi une crise cardiaque semble fournir moins d’informations sur le risque. La deuxième est de savoir s’il existe actuellement des thérapies cardiovasculaires qui pourraient aider à compenser le risque excessif associé à la mutation CHIP. Nous avons constaté que quatre médicaments cardiaques couramment utilisés semblent fonctionner aussi bien chez les patients atteints de mutation CHIP que chez ceux qui n’en sont pas atteints, sans qu’aucun bénéfice démesuré ne soit observé chez les patients atteints de mutation CHIP.
Comment avez-vous mené votre étude ?
Nous avons mené une étude observationnelle à grande échelle en utilisant les données de cinq grands essais cliniques randomisés du groupe d'étude TIMI pour examiner l'impact des traitements des maladies cardiaques sur les patients atteints de CHIP. 63 700 patients avec et sans CHIP ont été inclus dans l'analyse et ont été suivis pendant une durée moyenne de 2,5 ans.
Au terme de notre observation, nous avons constaté que 7 453 patients avaient subi au moins une crise cardiaque, un accident vasculaire cérébral ou une intervention visant à rétablir le flux sanguin vers le cœur. Nous avons également constaté que les patients atteints de CHIP présentaient un risque 30 % plus élevé de subir une première crise cardiaque, mais aucun risque accru de crises cardiaques répétées.
Quelles sont les implications ?
Nos résultats suggèrent que le dépistage du CHIP pourrait être plus utile chez les patients sans crise cardiaque antérieure que chez ceux qui en ont déjà subi une. Dans cette population, la présence du CHIP identifie un risque accru de 30 % qui peut être traité par des médicaments préventifs. Plus précisément, nous avons constaté que les thérapies cardiaques existantes telles que les médicaments hypolipémiants, un traitement antiplaquettaire et un agent cardiométabolique/antiglycémique semblent toutes apporter un bénéfice chez ces patients.
Quelles sont les prochaines étapes?
Après avoir concentré nos efforts sur les événements ischémiques tels que les crises cardiaques et les accidents vasculaires cérébraux dans cette analyse initiale du CHIP, nous avons hâte d'étudier la relation avec d'autres types de maladies cardiovasculaires dans cette vaste cohorte d'essais cliniques. Parmi les autres maladies d'intérêt figurent l'insuffisance cardiaque, la fibrillation auriculaire et les caillots sanguins dans les jambes ou les poumons.