Une étude publiée dans la revue eBioMédecine constate que l’exposition aux substances per- et polyfluoroalkylées peut augmenter le risque de cancer de la thyroïde dans les populations humaines.
Étude : Exposition aux substances per- et polyfluoroalkyles (PFAS) et risque de cancer de la thyroïde. Crédit image : Créé avec l’aide de DALL·E 3
Sommaire
La menace croissante du cancer de la thyroïde
Les taux mondiaux d’incidence et de mortalité des cancers de la thyroïde ont considérablement augmenté au cours des dernières décennies. Il y a eu une augmentation moyenne de 3,6 % de l’incidence du cancer de la thyroïde par an aux États-Unis entre 1974 et 2013. Une induction similaire a été observée en Chine, en Italie et en Turquie. Aux États-Unis, chez les jeunes âgés de 10 à 19 ans, une augmentation annuelle d’environ 4,4 % des taux d’incidence des cancers différenciés de la thyroïde (cancers folliculaires et papillaires de la thyroïde) a été rapportée entre 1998 et 2013.
Produits chimiques perturbateurs endocriniens : une préoccupation croissante
On pense qu’une exposition excessive à des perturbateurs endocriniens constitue un facteur de risque potentiel associé à une incidence accrue de cancers de la thyroïde. Les substances per- et polyfluoroalkyles (PFAS) sont un groupe de perturbateurs endocriniens utilisés dans les industries et les produits de consommation depuis les années 1940.
Présence omniprésente de PFAS
Ces produits chimiques ont des structures chimiques très stables et sont donc omniprésents dans le sol, l’eau et l’air. De plus, les PFAS peuvent être trouvés dans de nombreux produits de consommation (ustensiles de cuisine antiadhésifs, tissus résistant aux taches et mousse anti-incendie), dans les produits alimentaires et dans l’eau potable. Les preuves indiquent que l’acide perfluorooctanoïque (PFOA) et le perfluorooctane sulfonate (PFOS) sont les deux PFAS les plus largement utilisés, et que l’exposition à ces produits chimiques est associée à des risques potentiels pour la santé.
Dans cette étude, les scientifiques ont examiné si l’exposition aux PFAS pouvait augmenter le risque de cancer de la thyroïde.
Étudier le design
Au total, 88 patients adultes atteints d’un cancer de la thyroïde avec des échantillons de plasma prélevés au moment ou avant le diagnostic du cancer ont été inscrits à l’étude. Parmi ces patients, 74 avaient un cancer papillaire de la thyroïde. La population de l’étude témoin comprenait 88 individus en bonne santé appariés par paires sur l’âge, le sexe, l’origine ethnique, l’indice de masse corporelle, le statut tabagique et l’année de prélèvement de l’échantillon.
Des échantillons de plasma prélevés sur les patients ont été analysés par spectrométrie de masse par chromatographie liquide à haute résolution pour détecter huit types de PFAS.
Principales conclusions et leurs implications
L’analyse de corrélation entre l’exposition aux PFAS et le risque de cancer de la thyroïde a révélé une induction de 56 % du taux de diagnostic de cancer de la thyroïde par doublement de l’intensité linéaire du SPFO dans l’ensemble de la population étudiée. Cependant, aucune association significative n’a été observée entre les sept autres PFAS et le taux de diagnostic du cancer de la thyroïde.
En ce qui concerne les patients atteints d’un cancer papillaire de la thyroïde, une association positive similaire a été observée entre l’intensité du SPFO linéaire et le taux de diagnostic du cancer de la thyroïde.
Creuser plus profondément : analyses de sous-groupes
Une analyse de sous-groupe étudiant l’impact du moment de l’exposition sur le diagnostic du cancer de la thyroïde a été menée sur des patients diagnostiqués au moins un an après le prélèvement de l’échantillon. Les résultats de l’analyse de sous-groupes ont révélé que l’exposition au SPFO linéaire, au SPFO ramifié, à l’acide perfluorononanoïque, à l’acide perfluoro-octyl-phosphonique et à l’acide perfluoro-hexane-sulfonique linéaire peut augmenter considérablement le taux d’incidence du cancer de la thyroïde.
L’analyse des sous-groupes impliquant les cas de cancer de la thyroïde diagnostiqués dans l’année suivant le prélèvement de l’échantillon a montré une association similaire uniquement pour le SPFO linéaire, mais pas pour les autres SPFA testés.
Pourquoi les PFAS sont cancérigènes
L’étude révèle que l’exposition à des perturbateurs endocriniens comme les PFAS peut augmenter le risque de cancer de la thyroïde. Parmi les divers PFAS, les contributeurs les plus puissants sont le SPFO linéaire, le SPFO ramifié, l’acide perfluorononanoïque, l’acide perfluoro-octyl-phosphonique et l’acide perfluoro-hexane-sulfonique linéaire.
Les PFAS sont considérés comme cancérigènes en raison de leur capacité à induire une altération épigénétique, une immunosuppression, un stress oxydatif, une inflammation et une perturbation des voies hormonales et métaboliques.
Risque persistant dans l’eau potable
L’eau est une source majeure de SPFO et de PFOA ; les demi-vies de ces produits chimiques dans l’eau sont respectivement de 41 et 92 ans. Cela met en évidence le risque d’exposition persistante à des agents cancérigènes potentiels via de l’eau potable contaminée, ce qui peut à son tour augmenter considérablement le risque de cancer de la thyroïde dans le monde.
Impact durable sur la santé humaine
De plus, la demi-vie d’élimination du SPFO et du PFOA chez l’homme est de 3 à 7 ans. Cela indique que ces produits chimiques ont une capacité durable à perturber les voies de signalisation et à induire des risques potentiels pour la santé.
Orientations futures et lacunes de la recherche
L’étude s’est concentrée principalement sur le PFOS, le PFOA et d’autres PFAS à longue chaîne, qui ne représentent qu’une petite proportion du nombre total de PFAS. Ainsi, les scientifiques soulignent la nécessité de mener des études prospectives à grande échelle pour étudier l’impact de l’exposition à des PFAS supplémentaires sur le risque de cancer de la thyroïde.