La marche est une activité que l'on tient souvent pour acquise. La plupart des gens pensent qu'ils peuvent effectuer plusieurs tâches en même temps, en marchant et en mâchant du chewing-gum, sans trop d'efforts. En effet, chaque jambe peut bouger de manière rythmique, indépendamment de l'autre, sous le contrôle de son côté de la moelle épinière. Cependant, la capacité du cerveau humain à coordonner la démarche de manière à ce que les jambes d'un marcheur soient décalées d'un demi-pas l'une par rapport à l'autre, appelée « relation d'antiphase », n'est pas si simple lorsqu'un obstacle ou une asymétrie se produit, comme une courbe sur le chemin. Une meilleure compréhension de la manière dont une cadence de marche normale est maintenue pourrait conduire à des techniques de rééducation améliorées pour les patients qui ont subi un traumatisme cérébral ou d'autres problèmes neurologiques.
Dans une étude récemment publiée dans Biologie des communicationsDes chercheurs de l’Université d’Osaka ont recueilli des données cinématiques de patients en bonne santé marchant sur un tapis roulant qui était parfois perturbé par un changement soudain de vitesse. Cela a entraîné une perte momentanée de la relation d’antiphase, mais elle a été rapidement rétablie lorsque les sujets ont réorienté leurs mouvements de marche. Les données de cette expérience ont été analysées à l’aide d’un modèle mathématique de deux oscillateurs couplés – similaires à deux pendules reliés par un ressort – ainsi que d’une méthode d’inférence bayésienne. L’approche a permis aux chercheurs de calculer la fonction la plus probable qui représente la manière dont le cerveau applique son contrôle pour coordonner les mouvements des jambes.
Pour simplifier davantage le problème, la théorie de réduction de phase a été appliquée, qui suppose que le système perturbé revient à une solution périodique régulière, appelée cycle limite.
L'utilisation de l'inférence bayésienne nous a permis de déduire le contrôle de la coordination des jambes de manière quantitative. »
Takahiro Arai, auteur principal de l'étude
Étonnamment, les chercheurs ont découvert que la phase relative n’est pas contrôlée activement par le cerveau jusqu’à ce que l’écart par rapport à l’orientation correcte en opposition de phase dépasse un certain seuil. Autrement dit, le cerveau n’intervient pas activement pour coordonner la position relative des jambes jusqu’à ce qu’elles soient décalées d’un certain degré. Ils suggèrent que le fait de ne pas nécessiter l’application constante d’un contrôle améliore à la fois l’efficacité énergétique et la manœuvrabilité.
« D'après notre modèle, nous constatons que le cerveau n'est ni trop contrôlant, ce qui limiterait notre capacité à franchir les obstacles et consommerait également beaucoup de puissance cérébrale, ni trop laxiste, ce qui pourrait conduire à une chute lorsque les jambes deviennent trop désordonnées », explique l'auteur principal, Shinya Aoi.
Ces recherches pourraient s'avérer importantes pour améliorer la marche des personnes âgées ou des personnes ayant subi les effets neurologiques d'un accident vasculaire cérébral ou de la maladie de Parkinson. Elles pourraient également conduire au développement d'aides physiques permettant aux personnes de marcher plus naturellement.