La technique d’édition génétique CRISPR/Cas9 a permis aux chercheurs d’apporter des modifications précises et percutantes à l’ADN d’un organisme afin de corriger les mutations à l’origine des maladies génétiques. Cependant, la méthode CRISPR/Cas9 peut également entraîner des mutations involontaires de l’ADN pouvant avoir des effets négatifs. Récemment, des chercheurs japonais ont développé une nouvelle technique d’édition génétique aussi efficace que CRISPR/Cas9 tout en réduisant considérablement ces mutations involontaires.
Dans une nouvelle étude publiée dans Communications naturellesdes chercheurs dirigés par l’Université d’Osaka ont introduit une nouvelle technique appelée NICER, basée sur la création de plusieurs petites coupures dans des brins d’ADN simples par une enzyme appelée nickase.
L’édition CRISPR/Cas9 traditionnelle utilise de petits morceaux de code génétique appelés ARN guides et une enzyme appelée Cas9. Les ARN guides ciblent une section spécifique de l’ADN et l’enzyme Cas9 initie une cassure de la structure de l’ADN double brin à cet endroit. Cette cassure double brin est essentielle pour initier des modifications dans l’ADN. Cependant, la réparation cellulaire des cassures double brin peut conduire à des mutations involontaires de l’ADN, ainsi qu’à l’intégration d’ADN exogène dans le génome humain, ce qui soulève des problèmes de sécurité pour les applications cliniques de la technologie CRISPR/Cas9. Pour minimiser ces mutations involontaires, l’équipe de recherche dirigée par l’Université d’Osaka a étudié l’utilisation de la nickase Cas9, qui crée des cassures simple brin ou des « entailles » dans l’ADN qui sont généralement réparées sans provoquer de mutations.
Chaque chromosome du génome possède une copie « homologue ». Grâce à la technique NICER, les mutations hétérozygotes – dans lesquelles une mutation apparaît dans un chromosome mais pas dans sa copie homologue – sont réparées en utilisant le chromosome homologue non muté comme modèle. »
Akiko Tomita, auteur principal de l’étude
Pour leurs premières expériences, l’équipe de recherche a utilisé des cellules lymphoblastiques humaines présentant une mutation hétérozygote connue dans un gène appelé TK1. Lorsque ces cellules ont été traitées avec de la nickase pour induire une seule coupure dans la région TK1, l’activité TK1 a été récupérée à un faible taux. Cependant, lorsque la nickase a induit plusieurs coupures dans cette région sur les deux chromosomes homologues, l’efficacité de la correction génique a été multipliée par environ dix-sept via l’activation d’un mécanisme de réparation cellulaire.
« Une analyse génomique plus approfondie a montré que la technique NICER induisait rarement des mutations hors cible », explique l’auteur principal Shinichiro Nakada. « Nous avons également été ravis de constater que NICER était capable de restaurer l’expression de gènes pathogènes dans des cellules dérivées de maladies génétiques impliquant des mutations hétérozygotes composées. »
Parce que la méthode NICER n’implique pas de cassures double brin de l’ADN ni l’utilisation d’ADN exogène, cette technique semble être une alternative sûre aux méthodes CRISPR/Cas9 conventionnelles. NICER pourrait représenter une nouvelle approche pour le traitement des maladies génétiques causées par des mutations hétérozygotes.