La mucoviscidose est une maladie génétique qui provoque des troubles respiratoires et digestifs graves, parfois mortels. Un nouveau traitement, disponible depuis 2020, améliore la fonction pulmonaire et la qualité de vie. Cependant, elle n’éradique pas toujours les bactéries responsables des infections respiratoires. En étudiant des modèles 3D de cellules pulmonaires humaines, des scientifiques de l'Université de Genève (UNIGE) ont découvert que ce médicament n'empêche pas le développement à la surface des voies respiratoires de « stations d'accueil » sur lesquelles s'attachent des bactéries pour infecter l'organisme. . Ces stations d'accueil résultent d'une perturbation des signaux impliqués dans le développement cellulaire du système respiratoire. En combinant le traitement actuel avec d’autres molécules, il serait peut-être possible de rétablir l’équilibre cellulaire et ainsi de mieux prévenir les infections bactériennes. Ces résultats sont publiés dans le Journal américain de biologie cellulaire et moléculaire respiratoire.
La mucoviscidose est la maladie génétique la plus courante. Chaque année, elle touche un nouveau-né sur 3300 en Suisse. Les mutations du gène responsable de la protéine CFTR provoquent la sécrétion d'un mucus trop épais, qui obstrue les voies respiratoires. Même si une trithérapie, disponible en Suisse depuis 2020, a amélioré la qualité de vie des personnes atteintes de mucoviscidose, elle ne convient pas à toutes les personnes touchées et ne s'avère pas toujours efficace.
« Une proportion importante des personnes qui suivent ce traitement souffrent encore d'inflammations résiduelles et d'infections respiratoires persistantes. Comprendre les raisons de cela est essentiel si nous voulons améliorer la prise en charge des patients », explique Marc Chanson, professeur titulaire au Département de physiologie cellulaire et métabolisme de la Faculté de médecine de l'UNIGE et membre du Centre de recherche sur l'inflammation de Genève, qui a dirigé cette recherche. .
Un déséquilibre des signaux cellulaires
Lors d'études antérieures, l'équipe de Marc Chanson avait découvert que les cellules respiratoires touchées par la mucoviscidose construisent à leur surface des stations d'accueil qui permettent aux bactéries de s'ancrer fermement aux poumons. «Nous avons donc voulu savoir si la trithérapie avait un effet sur ce mécanisme si prédisposant à l'infection bactérienne», explique Mehdi Badaoui, chercheur et enseignant au Département de physiologie cellulaire et métabolisme de la Faculté de médecine de l'UNIGE. et dernier auteur de l'étude.
En comparant des modèles 3D de cellules pulmonaires humaines, tant des cellules saines que des cellules atteintes de mucoviscidose, les scientifiques ont démontré que la trithérapie actuellement utilisée n'empêche pas la formation de ces stations d'accueil. En effet, l’expression des gènes dans les cellules saines, par rapport aux cellules de mucoviscidose, montre un déséquilibre entre deux voies de signalisation cellulaire : la voie TGF-β est hyperactivée, tandis que la voie Wnt est inhibée. Les voies de signalisation cellulaire sont à la base du développement de tous les organismes multicellulaires, y compris les humains. Sans eux, les cellules ne peuvent pas se développer et fonctionner correctement.
En révélant une perturbation de ces voies de signalisation, l’équipe de recherche a mis en lumière un mécanisme clé : les cellules malades ne reçoivent pas les signaux appropriés et réagissent en créant des stations d’accueil qui leur sont nocives. En rétablissant l’équilibre entre ces deux voies de signalisation cellulaire, les scientifiques ont pu réduire considérablement le développement de ces structures.
Si nous parvenons à identifier un composé pharmaceutique capable de rétablir cet équilibre chez les patients, nous pourrions alors le combiner avec la trithérapie actuelle pour augmenter son efficacité et limiter les infections bactériennes, tout en réduisant ses effets secondaires.
Marc Chanson, professeur titulaire au Département de physiologie cellulaire et métabolisme de la Faculté de médecine de l'UNIGE