Dans une récente étude publiée dans la revue Sciences vétérinaires, des chercheurs ont rapporté la première preuve d’infections naturelles par le coronavirus 2 du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS-CoV-2) chez des lapins domestiques en France.
Sommaire
Fond
Suite à l’émergence du SRAS-CoV-2 fin 2019, de nombreux rapports ont indiqué que le SRAS-CoV-2 franchit les barrières au niveau des espèces pour provoquer une infection expérimentale ou naturelle chez plusieurs animaux domestiques et sauvages qui entrent en contact avec les humains.
Une étude récente a identifié le cerf de Virginie comme un réservoir du SRAS-CoV-2, ce qui soulève la possibilité de l’émergence de nouveaux réservoirs zoonotiques du SRAS-CoV-2 et de souches virales de pathologie inconnue et par la suite d’importants problèmes de santé publique. Cependant, les études qui rapportent des incidences d’infections par le SRAS-CoV-2 chez les lapins, sauvages et domestiqués, sont limitées.
À propos de l’étude
Dans la présente étude, les chercheurs ont prélevé des échantillons de sang de 144 lapins de compagnie dont le statut SARS-CoV-2 est inconnu lors de leurs visites vétérinaires pour évaluer la présence d’anticorps contre le SARS-CoV-2 de novembre 2020 à juin 2021, couvrant les pics de la deuxième et troisième vagues épidémiques de SARS-CoV-2 en France.
Ces échantillons de sang ont été prélevés dans des tubes d’acide éthylènediaminetétraacétique (EDTA) dans les hôpitaux vétérinaires. Après centrifugation, les échantillons de sérum ont été stockés à +4°C, avant d’être transportés au laboratoire de diagnostic vétérinaire, VEBIO, en suivant les consignes de sécurité appropriées pour éviter toute contamination pendant l’expédition et en s’assurant qu’ils parviennent au laboratoire dans les deux jours.
Une aliquote de l’échantillon a été prélevée pour des analyses biomédicales au VEBIO, et une autre aliquote de l’échantillon a été conservée à +4 °C avant d’être transportée dans des conditions optimales de sécurité au laboratoire MIVEGEC, Montpellier, pour la réalisation d’analyses sérologiques. Avant les tests, ces échantillons ont été maintenus à -20 °C au laboratoire MIVEGEC.
Les anticorps spécifiques du SRAS-CoV-2 dans des échantillons de sérum de lapins ont été évalués à l’aide d’un dosage immunologique sur microsphère multiplex (MIA), qui utilisait des billes de 10 µg de deux antigènes recombinants du SRAS-CoV-2, une pointe trimérique (tri-S) et un récepteur- antigènes du domaine de liaison (RBD). Les antigènes du SRAS-CoV-2 ont été couplés à des ensembles de microsphères MagPlex distincts à l’aide du kit de couplage aux amines et après l’incubation des mélanges de microsphères, les mesures ont été enregistrées à l’aide d’un instrument Luminex 200.
Résultats
Les résultats ont indiqué que près de 53 % des lapins étaient des mâles, 41 % étaient des femelles et que les informations sur le sexe n’étaient pas disponibles pour 6 % des lapins. L’âge moyen des lapins était de 4,4 ans, allant de un à huit ans.
Les résultats des tests en microsphère ont montré que sur l’ensemble des 144 échantillons, une lapine était séropositive pour les antigènes S RBD et tri-S et une autre lapine n’était positive que pour l’antigène S RBD.
En raison de l’absence de sérums pré-pandémiques et de l’hypothèse d’une infection naturelle par le SRAS-CoV-2 moins fréquente chez les lapins domestiques, la séropositivité dans le test de microsphère a utilisé un seuil de trois écarts-types supérieur au signal moyen de tous les autres échantillons.
Parmi les lapins séropositifs, les symptômes associés au SRAS-CoV-2 n’ont pas été observés par les vétérinaires lors du prélèvement des échantillons. Cependant, le syndrome vestibulaire intermittent était présent chez les lapins doublement séropositifs, ce qui était déjà fréquent chez les lapins. La séroprévalence était de 0,7 % en utilisant le critère de positivité restrictif le plus élevé sur les deux résultats positifs aux antigènes, et elle était de 1,4 % après un résultat positif pour au moins un antigène.
conclusion
Selon les auteurs, il s’agit de la toute première étude démontrant une infection naturelle par le SRAS-CoV-2 chez des lapins de compagnie, avec une séroprévalence de 0,7 à 1,4 %, très probablement acquise de leurs propriétaires positifs au SRAS-CoV-2. Bien que la détection d’anticorps seule n’indique pas nécessairement une réplication virale active, les résultats de l’étude étaient conformes aux études précédentes qui ont démontré la réplication active du SRAS-CoV-2 chez les lapins après une infection expérimentale sans aucun signe de manifestations cliniques de la maladie.
Dans des expériences précédentes avec des lapins, une dose virale relativement plus élevée était nécessaire pour développer une infection SARS-CoV-2 productive et était associée à une réplication virale plus faible. Une autre étude expérimentale menée sur trois lapins à queue blanche capturés dans la nature infectés par le SRAS-CoV-2 n’a pas réussi à établir une infection productive ou la présence d’anticorps neutralisants contre le SRAS-CoV-2.
Cependant, dans la présente étude, une très faible séroprévalence du SRAS-CoV-2 a été observée parmi les 144 lapins domestiques, indiquant la moindre sensibilité des lapins à l’infection par le SRAS-CoV-2, qui peut être due au contact peu fréquent entre le propriétaire et lapins de compagnie par rapport aux autres animaux de compagnie, comme les chiens et les chats.
Dans l’ensemble, l’étude a démontré que les infections par le SRAS-CoV-2 sont rares chez les lapins et qu’il est peu probable qu’elles agissent comme un réservoir pour le SRAS-CoV-2 ou contribuent à la propagation épidémique du SRAS-CoV-2 chez l’homme. Étant donné que ces résultats étaient basés sur l’évaluation des lapins de compagnie, de futures études axées sur les lapins de ferme et les lapins sauvages sont nécessaires pour déterminer la propagation du SRAS-CoV-2 dans différents contextes.