Des scientifiques ont mis au point un nouveau vaccin Lassa utilisant un virus recombinant de la rougeole et testé son efficacité protectrice contre la fièvre de Lassa. Une seule dose de vaccin s’est avérée induire une réponse immunitaire rapide et robuste chez les singes déjà immunisés contre le virus de la rougeole.
L’étude est publiée dans la revue Communication Nature.
Étude : Protection rapide induite par un vaccin Lassa à injection unique chez des singes cynomolgus mâles. Crédit d’image : Kateryna Kon/Shutterstock
Sommaire
Arrière-plan
La fièvre de Lassa causée par le virus de Lassa est une crise de santé publique importante en Afrique de l’Ouest. La maladie est souvent diagnostiquée à un stade avancé en raison de symptômes non spécifiques, notamment de la fièvre, de la fatigue et des maux de tête. Le taux de létalité de la maladie est de 15 à 30 % chez les patients hospitalisés.
L’habitat naturel du virus Lassa est constitué de rongeurs de la mastomys genres. La transmission de l’animal à l’homme se produit lors d’une exposition à de la poussière et à des fluides infectieux contaminés par des rongeurs. Bien que les soins de support et le traitement symptomatique semblent améliorer la survie des patients infectés par le virus Lassa, aucun vaccin efficace n’est actuellement disponible contre cette maladie mortelle.
Dans la présente étude, les scientifiques ont testé l’immunogénicité et l’efficacité protectrice du vaccin recombinant Lassa à base de virus de la rougeole chez des singes déjà immunisés contre le virus de la rougeole.
Le vaccin a été initialement développé en utilisant un virus de la rougeole recombinant exprimant la glycoprotéine du virus Lassa et la nucléoprotéine de la souche Josiah du virus Lassa. Par la suite, le vaccin a été conçu pour améliorer l’immunogénicité.
Des études antérieures ont montré qu’une seule injection de ce vaccin est très efficace pour induire une réponse immunitaire robuste et protéger contre différentes souches du virus Lassa chez les singes.
Comme mentionné par les scientifiques, la seule préoccupation concernant l’administration de ce vaccin chez l’homme est que l’immunité anti-rougeole préexistante chez l’homme pourrait réduire l’efficacité du vaccin. Compte tenu de cette préoccupation, les scientifiques ont conçu cette étude pour explorer davantage l’efficacité du vaccin chez les singes ayant une immunité anti-rougeole préexistante.
Efficacité protectrice du vaccin Lassa à base de virus de la rougeole
Les singes expérimentaux ont été immunisés par voie intramusculaire avec une seule injection de ce vaccin 16 jours ou 8 jours avant l’exposition au virus Lassa (souche Josiah). Un ensemble séparé de singes a été immunisé avec le vaccin une heure après la provocation virale.
Les résultats des examens cliniques n’ont révélé aucune détérioration clinique chez les animaux vaccinés, tandis que les animaux non vaccinés présentaient des symptômes cliniques, notamment des frissons, des problèmes d’équilibre et une température corporelle élevée. Une heure après l’épreuve virale, les animaux vaccinés présentaient également des anomalies cliniques, notamment des saignements de nez.
En ce qui concerne les paramètres biochimiques, une augmentation significative des marqueurs de la fièvre de Lassa sévère et de l’inflammation a été observée chez les animaux non vaccinés et 1 heure post-vaccinés. En revanche, aucune altération significative des paramètres sanguins n’a été observée chez les animaux vaccinés.
L’analyse multiplex de plusieurs médiateurs solubles de l’inflammation a révélé que les animaux vaccinés sont bien protégés contre de fortes réponses inflammatoires caractérisées par une augmentation des cytokines pro-inflammatoires, des chimiokines et des protéines cytolytiques.
De plus, aucune trace de virus infectieux n’a été détectée dans le sang et les autres organes des animaux vaccinés. En revanche, les animaux non vaccinés et 1 heure après la vaccination présentaient des titres accrus de virus infectieux et d’ARN viral dans le sang et d’autres organes.
Réponse immunitaire au vaccin Lassa à base de virus de la rougeole
L’analyse de la réponse immunitaire chez les animaux après provocation virale a révélé que les animaux vaccinés sont capables d’induire une forte liaison et des réponses d’anticorps neutralisants contre différentes protéines (glycoprotéine et nucléoprotéine) du virus Lassa. Ces animaux ont également présenté une réponse anticorps robuste spécifique de la rougeole après la provocation.
En revanche, les animaux non vaccinés et les animaux post-vaccinés 1 heure ont montré des niveaux détectables de réponse d’anticorps anti-virus de Lassa uniquement à la fin de l’expérience. En ce qui concerne la réponse anticorps spécifique à la rougeole, les animaux non vaccinés ont montré des taux d’anticorps détectables tout au long de la période d’étude. De plus, chez les animaux 1 heure après la vaccination, une augmentation progressive de la réponse des anticorps spécifiques de la rougeole a été observée au fil du temps.
En ce qui concerne la réponse immunitaire cellulaire, une induction robuste du nombre de lymphocytes T CD8+ circulants a été observée chez les animaux vaccinés. Cette réponse des lymphocytes T cytotoxiques était plus importante chez les animaux qui ont été provoqués avec le virus 8 jours après l’immunisation. L’activation de la réponse des lymphocytes T CD4+ a également été observée chez les animaux vaccinés. Ces observations étaient en outre justifiées par les profils transcriptomiques mesurés dans les cellules mononucléaires du sang périphérique. Dans l’ensemble, les observations indiquent que les lymphocytes T CD8+ sont vitaux pour le contrôle de l’infection par le virus Lassa.
Importance de l’étude
L’étude décrit qu’une seule injection du vaccin Lassa à base de virus de la rougeole peut fournir une protection robuste contre la fièvre de Lassa chez les singes ayant une immunité anti-rougeole préexistante. Cependant, le vaccin a besoin d’une fenêtre à court terme de 8 ou 16 jours pour pouvoir induire de fortes réponses immunitaires humorales et cellulaires contre le virus Lassa.
Les singes immunisés 8 jours avant l’épreuve virale présentent une réponse immunitaire plus robuste que ceux immunisés 16 jours avant l’épreuve virale. Cela met en évidence la possibilité d’un délai plus court entre la vaccination et la provocation virale. Cependant, le vaccin ne semble pas avoir de bénéfices thérapeutiques car l’immunisation après provocation virale ne parvient pas à induire une réponse immunitaire.