Dans une étude récente publiée dans le Actes de l’Académie nationale des sciencesles chercheurs ont exploré l’impact de la pandémie de la maladie à coronavirus 2019 (COVID-19) sur les troubles politiques exacerbés par la fatigue pandémique.
Les responsables de la santé ont identifié la « fatigue pandémique » comme un effet psychologique de la pandémie de coronavirus 2 du syndrome respiratoire aigu sévère (SARS-CoV-2). Ils ont averti que la « fatigue » peut décourager le respect des règles et des mandats liés à la santé. Néanmoins, l’épuisement dû à l’adhésion aux politiques des autorités pourrait avoir des implications qui vont bien au-delà du domaine de la santé. Selon les théories des sciences sociales, les conséquences réelles et perçues des programmes peuvent également contribuer au mécontentement à l’égard de l’establishment politique.
À propos de l’étude
Dans la présente étude, les chercheurs ont évalué comment la fatigue pandémique, l’incapacité perçue à adhérer aux contraintes, s’est développée au cours de la pandémie et si elle a contribué aux troubles politiques.
Du 13 septembre 2020 au 20 juillet 2021, l’équipe a mené des enquêtes par échantillonnage par quota dans huit pays, dont le Danemark, la France, la Hongrie, l’Allemagne, l’Italie, les États-Unis d’Amérique, le Royaume-Uni et la Suède. L’intensité, ainsi que les réponses nationales enregistrées face à l’épidémie de COVID-19, l’ampleur de la polarisation politique et la solidité des institutions démocratiques étaient les facteurs représentés par les pays sélectionnés. Une ou deux fois par mois, environ 500 répondants par pays ont été interrogés pour obtenir des données. Au cours de cette période, 13 cycles de données ont été collectés au Danemark, avec 12 cycles dans le reste des pays.
Dans ces huit pays, une société de sondage nommée Epinion a mené une enquête par panel en ligne auprès de répondants adultes. Les participants à l’enquête ont été sélectionnés par quota pour représenter les marges de population pour l’âge, le sexe et la région géographique. La fatigue pandémique a été mesurée sur la base de l’accord des répondants avec l’énoncé : « Je ne crois pas pouvoir continuer à respecter les limitations du coronavirus plus longtemps ». Les répondants ont exprimé leur opinion sur une échelle de cinq points allant de « tout à fait en désaccord » à « tout à fait d’accord ».
L’étude a examiné trois prédicteurs potentiellement importants au niveau des pays pour évaluer l’apparition de la fatigue pandémique. Tout d’abord, l’Oxford COVID-19 Government Response Tracker (OxCGRT) a été utilisé pour mesurer la rigueur des politiques nationales COVID-19. L’indice a suivi la mise en œuvre d’actions publiques et sociétales contre la pandémie dans un pays particulier à un moment donné. Deuxièmement, le nombre enregistré de mortalités quotidiennes par habitant a été utilisé pour déterminer la gravité de la pandémie dans la nation donnée. Troisièmement, l’équipe a fourni une mesure directe du temps écoulé depuis le début de l’épidémie.
Pour déterminer si la fatigue pandémique contribue au mécontentement politique, la corrélation entre la fatigue pandémique et six indices de mécontentement au niveau individuel a été évaluée : 1) opposition aux limitations de la COVID-19, 2) protestations contre les restrictions, 3) confiance dans les conspirations de la COVID-19, 4) préoccupation pour les droits démocratiques, 5) méfiance à l’égard du gouvernement et 6) soutien au leadership.
Résultats
Dans la plupart des pays, la rigueur politique et la lassitude face à la pandémie ont affiché des tendances parallèles, comme le montre la tendance générale. Ainsi, l’équipe a détecté une augmentation de la rigueur des politiques dans tous les pays au cours de la première moitié de la période d’étude jusqu’en janvier 2021, ce qui correspond à l’augmentation de la fatigue pandémique. De même, les niveaux de rigueur globaux ont été constamment élevés tout au long des premiers mois de 2021 avant de baisser en avril 2021. En Allemagne et en Italie, cela a entraîné une réduction de la fatigue pandémique tout au long de la même période.
La relation entre la fatigue pandémique et la gravité de la pandémie a affiché une corrélation négative. Dans chacun des huit pays, la fatigue avait tendance à augmenter lorsque le taux de mortalité quotidien diminuait. La fatigue pandémique a augmenté au fil du temps à mesure que la rigueur augmentait et que la gravité de la pandémie diminuait. Néanmoins, les résultats ont également indiqué que ces prédicteurs au niveau macro présentaient une intercorrélation significative.
Au cours de la période d’étude, la fatigue pandémique a augmenté d’environ 5,8 % tous les six mois dans les huit pays. L’équipe a noté que la fatigue pandémique augmentait d’environ 3,3 points lorsque les politiques étaient plus strictes. Lorsque l’intensité de la pandémie s’est aggravée, les citoyens semblaient avoir moins de fatigue pandémique. Plus précisément, lorsque la mortalité due au COVID-19 a augmenté de deux écarts-types (ET), il y a eu une baisse de la fatigue pandémique d’environ 2,2 % en moyenne. Cela a montré que les gens se sentaient moins fatigués de respecter un ensemble continu de limites à mesure que la gravité de l’épidémie augmentait.
L’équipe a trouvé une corrélation entre la fatigue pandémique et l’insatisfaction politique. En particulier, lorsque les répondants qui ont déclaré des niveaux de fatigue élevés ont été comparés à ceux qui ont de faibles niveaux de fatigue, les modèles de référence ont indiqué une augmentation de 39,5 points de pourcentage en opposition aux restrictions pandémiques, une augmentation de 27,6 points de soutien aux protestations contre ces restrictions, une augmentation de 29,1 points Augmentation de 14,2 % de la confiance dans les conspirations liées au COVID-19, une augmentation de 36,2 % des inquiétudes concernant les droits démocratiques et une augmentation de 14,2 % de la méfiance envers le gouvernement. De même, les individus fatigués ont une diminution de 3,7 % de leur soutien aux leaders forts.
Dans l’ensemble, les résultats de l’étude ont montré que la fatigue pandémique augmentait à mesure que la rigueur s’intensifiait, que les taux de mortalité diminuaient et que le temps passait. Des évaluations complémentaires ont révélé qu’une période plus longue d’interventions exigeantes avait un effet cumulatif sur le public et était particulièrement épuisante.