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Le problème de santé
L’acrophobie est la version la plus sévère de l’intolérance visuelle à la hauteur, qui elle-même concerne 28 % des adultes (32 % chez les femmes et 25 % chez les hommes). Pour les enfants de huit à dix ans, le chiffre monte à 34 %, sans prépondérance de genre. Quand elle survient pour la première fois à l’âge adulte, cette intolérance persiste généralement, tandis que la manifestation enfantine se résout spontanément en quelques années. Le phénomène se manifeste par un contrôle anxieux de la stabilité posturale qui entraîne un raidissement de tout le corps. L’exploration visuelle se réduit de préférence à la fixation de l’horizon, et la marche se fait plus lente, plus prudente et plus craintive. Facteur critique, l’anxiété augmente avec la hauteur, comme le raidissement. Habituellement, une personne arrive à une saturation d’information à environ vingt mètres au-dessus du sol pour les symptômes posturaux et à quarante mètres pour l’anxiété, sauf pour les patients acrophobes qui voient ces troubles continuer de s’aggraver jusqu’à soixante-dix mètres. L’acrophobie diffère du simple vertige. Véritable phobie, cette peur du vide se déclenche à la simple pensée de se retrouver en hauteur. Elle entraîne des comportements d’évitement susceptibles de handicaper fortement la vie quotidienne : refus d’entrer dans un bâtiment de plusieurs étages, de voyager en avion, de randonner en montagne, d’accéder à une terrasse, de monter sur un escabeau…
L’étude de référence
Une méta-analyse a évalué les dix-neuf thérapies existantes contre l’acrophobie en identifiant dix-sept essais randomisés. Ils démontrent qu’une psychothérapie dispensée en réalité virtuelle présente une efficacité significativement supérieure aux interventions placebo et contrôle. Par ailleurs, cette INM est associée à une meilleure amélioration quand on la combine à d’autres traitements. La méta-analyse la recommande donc comme premier choix thérapeutique pour traiter l’acrophobie.
Descriptif de la méthode
L’INM est une application de réalité virtuelle appelée Now I Can Do Heights. Associée à un visiocasque, elle est destinée aux plus de dix-huit ans et conçue pour permettre de se passer d’un thérapeute de soutien, bien que l’on puisse l’utiliser dans un cadre clinique classique avec un praticien. La thérapie est généralement administrée durant six séances de trente minutes sur une période de deux semaines. Au début de chaque session, le logiciel calibre numériquement le corps du participant qui se tient debout. Le patient peut alors marcher dans un environnement virtuel. Un thérapeute, également virtuel, lui délivre des informations scientifiques sur la peur des hauteurs et son traitement d’un point de vue cognitif. Il pose ensuite une série de questions sur les plus grandes peurs envisageables (tomber, se jeter dans le vide…) et en fonction de ses réponses sont attribuées des notes de conviction. L’objectif est de découvrir à quel point ses craintes étaient justifiées. Tout au long du programme, le patient comprend mieux dans quelle mesure il était en sécurité dans telle situation et il va mettre ses attentes à l’épreuve. Le coach virtuel explique comment cet apprentissage dépend de l’abandon de comportements de recherche de sécurité. Le plus évident est d’éviter les hauteurs, mais on peut aussi fermer les yeux, se répéter une phrase réconfortante ou s’accrocher à quelque chose. Ces défenses rassurent, mais empêchent de s’engager dans des situations perçues comme anxiogènes. Ce traitement n’est pas une thérapie d’exposition invitant à se confronter à une situation jusqu’à ce que l’anxiété soit réduite, mais il consiste à tester de façon répétée des expériences comportementales afin d’apprendre que l’on y était plus en sécurité qu’on ne le croyait. Dans un grand complexe virtuel de dix étages, différentes tâches sont proposées, généralement engageantes, comme sauver un chat perché dans un arbre ou jouer du xylophone au bord d’une terrasse. Le coach encourage le participant avec empathie et calme. Il lui répète les points d’apprentissage clés et demande au patient s’il se sent plus en sécurité qu’auparavant. Le patient peut décider de répéter certaines tâches, ou de passer à l’étage supérieur. À la fin de la session, il est ramené au rez-de-chaussée du complexe virtuel et invité à essayer de se confronter à de vraies hauteurs avant la prochaine séance.
Les mécanismes d’action
Pour arriver à une désensibilisation progressive de l’objet phobique, des stratégies d’adaptation comportementale ciblent l’exploration visuelle, le contrôle de la posture et de la locomotion. Des mécanismes cognitifs sont à l’œuvre pour modifier l’auto-efficacité perçue et les croyances dysfonctionnelles, composantes ayant un fort impact sur la réponse cardiaque, l’inhibition et les comportements d’évitement.
Bénéfices
De plus en plus utilisée en psychiatrie pour permettre aux personnes acrophobes de traiter leurs peurs du vide dans des conditions sans risque, la réalité virtuelle est efficace sur un temps de traitement court de deux semaines, comme l’a notamment démontré un essai randomisé. 69 % de ses participants ont vu leur acrophobie passer sous le seuil de significativité clinique, et elle a été réduite de moitié pour les trois-quarts d’entre eux.
Quels sont les risques ?
Environ 10 % des patients se plaignent de malaises lors des séances de réalité virtuelle. Ils ressentent un inconfort car un décalage se produit entre le système d’équilibration du corps et celui de la vision, généralement chez des personnes sensibles au mal des transports. Par ailleurs, des patients traités par cette INM peuvent présenter des récidives d’acrophobie.
Conseils pratiques
Le scepticisme des soignants à l’égard de ce type de thérapie peut influencer négativement vos résultats. Alors adressez-vous à une personne suffisamment experte dans ce domaine des INM relativement nouveau afin qu’elle puisse vous conseiller le système le plus adapté à vos besoins.
À qui s’adresser ?
Un médecin ou un psychothérapeute spécialiste de thérapie cognitivo-comportementale sensibilisé à ce type d’INM.