Les nanomatériaux inspirés des protéines amyloïdes suscitent l’intérêt des nanotechnologies, en raison de leur modularité, de leur auto-assemblage contrôlé et de leur stabilité. Un avantage clé de ces matériaux est la possibilité d’incorporer des molécules de protéines avec la fonctionnalité souhaitée grâce à la conception génétique. Cependant, beaucoup ne conviennent pas aux applications biomédicales, car ils sont insolubles et ne peuvent pas être administrés dans les fluides corporels.
Des chercheurs de l’Universitat Autònoma de Barcelona (UAB) ont développé un nouveau type de nanoparticules inspirées de la structure des amyloïdes, capables de neutraliser le virus SARS-CoV2. Les nanostructures, appelées OligoBinders, sont solubles, biocompatibles et stables dans le plasma et ont une grande capacité à lier les particules virales. Cette liaison bloque l’interaction entre la protéine de pointe du virus et le récepteur ACE2 sur la membrane cellulaire responsable de l’infection.
La recherche, publiée dans la revue Matériaux appliqués et interfaces ACSa été dirigée par Salvador Ventura et Susanna Navarro, chercheurs du Département de biochimie et de biologie moléculaire et de l’Institut de biotechnologie et de biomédecine (IBB) de l’UAB.
Pour développer les nanoparticules, les chercheurs ont exploité la capacité d’auto-assemblage d’un petit peptide de levure, nommé Sup35, auquel ils ont fusionné deux miniprotéines, LCB1 et LCB3. Ces miniprotéines sont formées de trois hélices, sont très stables et établissent de multiples contacts avec la protéine virale.
Leur approche modulaire leur a permis de concevoir deux nanoparticules sphériques portant chacune plus de 20 copies de LCB1 ou LCB3 à leur surface. « Ce fait donne aux nanoparticules une grande avidité pour le virus et leur permet de se lier simultanément à plusieurs protéines de pointe », explique Susanna Navarro.
Les chercheurs, qui ont mené leur étude sur des particules similaires au virus SARS-CoV2 (SC2-VLP), mettent en évidence le grand pouvoir inhibiteur de ces nouvelles nanoparticules et leur potentiel comme alternative efficace à l’utilisation d’anticorps monoclonaux pour capter ou neutraliser le virus.
Les nanosphères développées pourraient avoir des applications en biomédecine, par exemple, dans les traitements nasaux auto-administrés, en biotechnologie, pour produire des kits de diagnostic, ou comme agent prophylactique potentiel. De plus, une production à grande échelle serait facile et peu coûteuse, car l’assemblage se fait spontanément après incubation des molécules.
« La stratégie modulaire que nous proposons pourrait être adaptée pour d’autres virus d’intérêt, en incorporant le domaine inhibiteur correspondant à la nanoparticule. De plus, elle offre la possibilité de construire des nanoparticules combinant deux ou plusieurs régions fonctionnelles, qui cibleraient simultanément différentes molécules du virus. même virus, pour créer à l’avenir des molécules aux activités antivirales renforcées », explique Salvador Ventura.
Dans la recherche ont également participé Molood Behbahanipour, du groupe de recherche IBB, et Roger Benoit, du Laboratoire de biologie à l’échelle nanométrique de l’Institut Paul Scherrer en Suisse.