Le génome humain, une tapisserie complexe d’informations génétiques sur la vie, s’est révélé être un trésor de caractéristiques étranges. Parmi eux se trouvent des segments d’ADN capables de « sauter » et de se déplacer à l’intérieur du génome, appelés « éléments transposables » (ET).
En changeant de position dans le génome, les ET peuvent potentiellement provoquer des mutations et modifier le profil génétique de la cellule, mais ils sont également les principaux orchestrateurs de l’organisation et de l’expression de notre génome. Par exemple, les ET contribuent aux éléments régulateurs, aux sites de liaison aux facteurs de transcription et à la création de transcrits chimériques – des séquences génétiques créées lorsque des segments de deux gènes ou parties du génome différents se réunissent pour former une nouvelle molécule d’ARN hybride.
Correspondant à leur importance fonctionnelle, il a été reconnu que les ET représentent la moitié de l’ADN humain. Cependant, à mesure qu’ils bougent et vieillissent, les ET subissent des changements qui masquent leur forme originale. Au fil du temps, les ET « dégénèrent » et deviennent moins reconnaissables, ce qui rend difficile pour les scientifiques de les identifier et de les suivre dans notre plan génétique.
Dans une nouvelle étude, des chercheurs du groupe de Didier Trono à l’EPFL ont trouvé un moyen d’améliorer la détection des ET dans le génome humain en utilisant des génomes ancestraux reconstruits de diverses espèces, ce qui leur a permis d’identifier des ET dégénérés auparavant indétectables dans le génome humain. . L’étude est publiée dans Génomique cellulaire.
Les scientifiques ont utilisé une base de données de génomes ancestraux reconstruits de différents types d’espèces, à la manière d’une « machine à voyager dans le temps » génomique. En comparant le génome humain avec les génomes ancestraux reconstruits, ils ont pu identifier chez ces derniers des ET qui, au fil des millions d’années, sont devenues dégénérées (usées) chez l’homme.
Cette comparaison leur a permis de détecter (« annoter ») des ET qui auraient pu manquer dans des études antérieures utilisant uniquement des données provenant du génome humain.
En utilisant cette approche, les scientifiques ont découvert un plus grand nombre d’ET que ce que l’on savait auparavant, ajoutant ainsi de manière significative à la part de notre ADN apportée par les ET. En outre, ils ont pu démontrer que ces séquences TE nouvellement découvertes jouaient les mêmes rôles régulateurs que leurs parents plus récents et déjà identifiés.
Les applications potentielles sont vastes.
Une meilleure compréhension des ET et de leurs régulateurs pourrait permettre de mieux comprendre les maladies humaines, dont beaucoup seraient influencées par des facteurs génétiques. En premier lieu, le cancer, mais aussi les troubles auto-immuns et métaboliques, et plus généralement la réponse de notre organisme aux stress environnementaux et au vieillissement.
Didier Trono à l’EPFL