Dans une étude récente publiée dans la revue Nature Comportement humainDes chercheurs des États-Unis ont mené une étude d’association pangénomique (GWAS) sur les traits de personnalité afin d’identifier les locus génétiques significatifs et d’explorer les corrélations génétiques potentielles entre les traits de personnalité et les troubles psychiatriques. Ils ont identifié 208 locus significatifs à l’échelle du génome pour le névrosisme, dont 79 nouveaux locus non découverts dans les études précédentes et 62 nouveaux locus au total. Ils ont identifié de nouveaux locus pour d’autres traits de personnalité, révélant des influences génétiques complexes sur la personnalité et sa relation avec des troubles psychiatriques comme la dépression et l’anxiété.
L'axe des Y représente la corrélation génétique. Les barres d'erreur (en noir) indiquent les IC à 95 % de la corrélation génétique estimée. L'anxiété indique les substances prises pour l'anxiété ; les médicaments sont prescrits pendant au moins 2 semaines. Les activités de bricolage intenses décrivent les types d'activité physique au cours des 4 dernières semaines ; par exemple, le désherbage, la tonte de la pelouse, la menuiserie et le creusement. Le comportement maniaque décrit un comportement maniaque/hyper pendant 2 jours. Étude : Une enquête à l'échelle du génome sur l'architecture génétique sous-jacente des traits de personnalité et le chevauchement avec la psychopathologie
Sommaire
Arrière-plan
Les données suggèrent que les « cinq grands » traits de personnalité, dont l’extraversion (le degré d’énergie, de sociabilité et d’amabilité), le névrosisme (la tendance à éprouver des sentiments négatifs), l’agréabilité (la capacité à être empathique et serviable), la conscience professionnelle et l’ouverture d’esprit, influencent le comportement et la susceptibilité aux troubles psychiatriques. Des études génétiques ont montré que le névrosisme est fortement lié à la dépression et à l’anxiété, et qu’une fraction significative du risque génétique de dépression est associée à ce trait. La schizophrénie est également liée au névrosisme, des locus génétiques communs ayant été identifiés entre les deux. Au cours des 15 dernières années, la GWAS a permis d’identifier des variantes génétiques spécifiques associées à ces traits, en particulier le névrosisme, pour lequel des centaines de locus ont été découverts. Des études récentes portant sur des échantillons plus importants ont révélé des locus génétiques supplémentaires liés à l’extraversion, approfondissant ainsi notre compréhension de l’architecture génétique sous-jacente à ces dimensions de la personnalité.
Dans la présente étude, les chercheurs ont mené des GWAS et des méta-analyses sur ces cinq traits de personnalité afin d’explorer l’hérédité génétique, les voies biologiques et les relations causales potentielles avec la dépression et l’anxiété. L’étude a mis l’accent sur l’identification de nouveaux loci génétiques, l’exploration de leur rôle dans l’architecture génétique plus large et la compréhension de l’interaction entre ces traits et d’autres comportements humains complexes.
À propos de l'étude
L'étude a utilisé les données du Million Veteran Program (MVP) pour mener une étude GWAS sur les « cinq grands » traits de personnalité, en analysant un échantillon d'environ 224 000 individus. Les données ont été imputées à l'aide des panels 1 000 Genomes et African Genome Resources, et les analyses ont été stratifiées par ascendance européenne (EUR) et africaine (AFR). Les méta-analyses ont combiné les données du MVP avec d'autres ensembles de données, augmentant la taille des échantillons jusqu'à environ 682 000 pour le névrosisme. L'étude a également mené une méta-analyse trans-ascendance, qui a identifié 216 loci significatifs à l'échelle du génome pour le névrosisme, dont 16 nouveaux loci, soulignant davantage la complexité des influences génétiques sur ce trait. L'héritabilité du polymorphisme d'un seul nucléotide (SNP) a été estimée à l'aide de la régression du score de déséquilibre de liaison (LDSC). En outre, des études d’association à l’échelle du transcriptome (TWAS) et du protéome (PWAS) ont été utilisées pour identifier les gènes liés aux traits de personnalité, suivies d’analyses des voies, des perturbations médicamenteuses et de cartographie fine. La randomisation mendélienne (RM) a été utilisée pour explorer les relations causales entre les traits de personnalité, la dépression et l’anxiété. Cette analyse a montré une relation causale bidirectionnelle, avec des effets plus forts du névrosisme à l’anxiété, soulignant l’interaction significative entre ces traits et les troubles psychiatriques. Enfin, les scores de risque polygénique ont été validés à l’aide d’une cohorte indépendante de Yale-Penn.
Résultats et discussion
Dans l'échantillon EUR, 34 loci significatifs ont été identifiés pour les cinq traits de personnalité, les nombres les plus élevés étant pour l'extraversion et le névrosisme (11 chacun). Les loci notables comprenaient MAD1L1 et CRHR1 pour le névrosisme et CRHR1 et MAPT pour l'extraversion. La conscienciosité avait deux loci près de FOXP2 et ZNF704, l'ouverture avait sept loci, dont BRMS1 et RIN1, et l'agréabilité avait trois loci près de SOX7 et PINX1. Deux loci significatifs pour l'agréabilité ont été trouvés dans l'échantillon AFR, mais aucune variante significative à l'échelle du génome (GWS) n'a été trouvée pour les autres traits.
La méta-analyse pour le neuroticisme a identifié 208 loci GWS, avec 79 nouveaux loci non trouvés dans les études précédentes et 62 nouveaux loci au total. Les loci significatifs comprenaient NSF, KANSL1 et CRHR1, principalement sur les chromosomes 1 et 11. L'analyse d'extraversion a révélé 14 loci significatifs, le plus notable étant le chromosome 12 près de WSCD2. Le chromosome 11 a montré des associations avec le neuroticisme, l'extraversion et l'agréabilité, avec des résultats qui se chevauchent près d'ARNTL1. Les détails complets des locus sont fournis dans des tableaux et des figures supplémentaires.
Une méta-analyse trans-ascendance combinant les données EUR et AFR a identifié 216 loci GWS pour le névrosisme, dont 16 nouveaux, et a découvert des loci supplémentaires pour l'agréabilité et la conscience. La TWAS a trouvé des associations génétiques significatives avec des traits comme le névrosisme et l'extraversion dans divers tissus cérébraux et sanguins, mettant en évidence des gènes tels que CRHR1 et KANSL1-AS1. La PWAS a lié 47 protéines au névrosisme, dont beaucoup présentaient des signaux de colocalisation. Le névrosisme a également montré la plus grande héritabilité parmi les traits étudiés et a révélé un chevauchement génétique substantiel avec l'anxiété. L'analyse de corrélation génétique locale a trouvé des corrélations variables entre les traits, avec le chevauchement le plus élevé entre le névrosisme et l'extraversion.
La cartographie fine des variantes a permis d'identifier 166 variantes génétiques uniques liées à ces traits, le névrosisme en étant le plus souvent responsable. L'étude a également révélé des associations significatives entre les traits de personnalité et les troubles psychiatriques, en particulier entre le névrosisme et la dépression/anxiété. L'analyse des perturbations médicamenteuses a suggéré des traitements potentiels du névrosisme basés sur les gènes associés, avec un certain chevauchement avec les médicaments contre la dépression. L'analyse MR a montré des effets causaux bidirectionnels entre le névrosisme et la dépression/anxiété, avec des effets plus forts du névrosisme à l'anxiété. Enfin, la prédiction du score de risque polygénique a montré une précision modeste dans la prédiction des traits de personnalité.
Conclusion
En conclusion, l’étude améliore notre compréhension des bases génétiques des traits de personnalité et de leurs liens avec la santé mentale. Elle a identifié de nouvelles associations génétiques pour les traits de personnalité tout en explorant leurs interactions complexes avec des pathologies telles que la dépression et l’anxiété. Les études futures pourraient comparer des échantillons profondément phénotypés avec les données MVP et s’appuyer sur cette recherche pour augmenter la précision de l’agréabilité, de la conscience professionnelle, de l’ouverture et de l’extraversion.