L’un des principaux défis en oncologie est le développement de médicaments contre les oncogènes KRAS. Ces oncogènes – gènes qui causent le cancer lorsqu’ils sont mutés – sont responsables d’un quart de tous les cancers humains, y compris les trois types de tumeurs avec les taux de mortalité les plus élevés : l’adénocarcinome pulmonaire, le carcinome colorectal et l’adénocarcinome canalaire pancréatique.
Bien que les oncogènes KRAS aient déjà été découverts par le groupe de Mariano Barbacid il y a quatre décennies, le premier médicament contre eux – Sotorasib, Amgen – a été approuvé par la FDA il y a seulement un an. Aussi important que soit ce jalon, le Sotorasib n’agit que contre les tumeurs porteuses d’une des multiples mutations présentes dans les oncogènes KRAS et son impact clinique est donc limité. De plus, les patients traités avec ce médicament développent une résistance en quelques mois de traitement.
RAF1 et adénocarcinome pulmonaire
Au-delà du développement de médicaments contre le KRAS, l’un des axes de recherche les plus actifs à l’heure actuelle vise à identifier des inhibiteurs de protéines, comme RAF1, responsables de la transmission des signaux oncogéniques du KRAS.
À cet égard, le laboratoire de Mariano Barbacid, utilisant des modèles de souris génétiquement modifiées qui récapitulent fidèlement les adénocarcinomes pulmonaires humains, a démontré il y a quatre ans que l’élimination de la protéine RAF1 induisait la régression de la plupart des tumeurs sans effets toxiques significatifs.
Cible : dégrader RAF1
Ces observations ont suscité un énorme intérêt pour trouver des médicaments capables de dégrader RAF1. Les résultats publiés aujourd’hui dans Cellule moléculaire ouvrent une fenêtre d’opportunité pour concevoir des dégradeurs de RAF1 qui, seuls ou en combinaison avec des inhibiteurs de KRAS, pourraient générer un effet thérapeutique important chez les patients atteints d’adénocarcinome pulmonaire induit par les oncogènes KRAS.
La détermination de la structure tridimensionnelle de RAF1 est une étape clé vers cet objectif, car elle révèle les parties de la protéine sur lesquelles un médicament pourrait s’ancrer chimiquement, et favorise sa destruction par la machinerie cellulaire (les cellules ont des mécanismes de nettoyage qui dégradent protéines défectueuses ou inutiles).
Les principaux chercheurs responsables de ce travail sont Sara García-Alonso, du CNIO, et Pablo Mesa, du groupe de biologie moléculaire et structurale de l’université de Copenhague.
Les informations fournies par cette étude ouvrent une gamme d’options pour développer des médicaments qui peuvent dégrader RAF1. Une fenêtre d’opportunité est maintenant ouverte pour concevoir des dégradeurs de RAF1 avec un effet thérapeutique important chez les patients atteints d’adénocarcinome pulmonaire induit par les oncogènes KRAS. »
Sara García-Alonso, CNIO