On ne sait pas encore parfaitement si la co-infection avec un autre agent pathogène peut avoir un impact sur la gravité de la maladie à coronavirus 2019 (COVID-19). Il a été rapporté dans des études précédentes que des co-infections entre le coronavirus 2 du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS-CoV-2) et d’autres virus respiratoires courants se sont produites. Une méta-analyse récente de 30 études, dont 3834 patients atteints de COVID-19, a révélé que 7 % avaient une co-infection bactérienne et 3 % avaient des co-infections virales, le virus de la grippe A (IAV) et le virus respiratoire syncytial étant les plus courants.
Étude : L’augmentation de la létalité de la grippe et de la co-infection SARS-CoV-2 est empêchée par l’immunité contre la grippe mais pas par l’immunité SARS-CoV-2. Crédit d’image : Kateryna Kon/Shutterstock
Dans une étude publiée dans La nature, des chercheurs de l’Institut israélien de recherche biologique ont délimité l’interaction entre les infections par l’IAV et le SRAS CoV-2. Pour établir un modèle de souris sensible au SRAS-CoV-2, les auteurs ont utilisé des souris transgéniques exprimant l’enzyme humaine de conversion de l’angiotensine 2 (hACE2) sous le contrôle du promoteur humain de la cytokératine 18 (souris K18-hACE2).
L’étude
Tout d’abord, les auteurs ont testé le résultat de l’infection par le SRAS-CoV-2 deux jours après l’infection grippale (dpli) pendant la grippe présymptomatique. A ces stades précoces, le titre viral d’IAV dans les lingues était élevé, mais les souris ne présentaient aucune manifestation de la maladie. À cinq dpli, les souris infectées par l’IAV ont commencé à perdre du poids, et à 9 à dix dpli, elles présentaient une morbidité maximale.
Les souris qui n’étaient infectées que par la grippe ou le SRAS-CoV-2 ont affiché un taux de mortalité de 38 %, tandis que toutes les souris co-infectées sont mortes cinq à sept jours après l’infection par le SRAS-CoV-2 (dpsi). À six à sept dpli, les souris infectées et co-infectées par l’IAV ont commencé à perdre du poids. Cependant, la perte de poids maximale des souris infectées par l’IAV a été atteinte à 8 dpli, tandis que les souris co-infectées ont continué à perdre du poids jusqu’à dix dpli.
Enfin, les auteurs ont évalué les effets de la co-infection lorsque l’administration du SRAS-CoV-2 s’est produite au stade symptomatique tardif de la grippe lorsqu’une morbidité maximale a été détectée. Le poids corporel et le taux de survie des souris n’ont pas été affectés par l’infection par le SRAS-CoV-2 à huit dpli.
Les auteurs ont obtenu l’immunité contre le SARS-CoV-2 chez les souris par immunisation intramusculaire du SARS-CoV-2. L’immunisation par cette voie a induit à la fois des réponses cellulaires et humorales contre le SARS-CoV-2 et était suffisante pour protéger les souris d’un défi SARS-CoV-2. Cependant, alors que la mortalité causée par l’infection par le SRAS-CoV-2 a été complètement évitée par l’immunité préexistante au SRAS-CoV-2, aucun effet n’a été observé concernant la morbidité et la mortalité causées par la co-infection par le SARS-CoV-2 et l’IAV.
Les auteurs ont également examiné une autre voie d’immunisation pour exclure la possibilité qu’une protection inadéquate contre la co-infection soit due à l’immunisation intramusculaire. La voie d’immunisation intranasale a été utilisée par les auteurs, qui n’a pas non plus protégé contre la co-infection.
Les souris ont reçu une immunisation intramusculaire de l’IAV, 30 jours avant l’infection par le SRAS-CoV-2 et/ou l’IAV, afin de déterminer si une immunité préexistante à l’IAV peut protéger contre la co-infection. La pré-exposition à l’IAV a induit des réponses cellulaires et humorales contre l’IAV et a semblé réduire la morbidité observée lors de l’infection par l’IAV.
Le taux de survie du SRAS-CoV-2 n’a pas été affecté par la pré-exposition à l’IAV. Fait intéressant, la mortalité et les manifestations cliniques graves associées à la co-infection par l’IAV et le SRAS-CoV-2 ont été prévenues par l’immunité à l’IAV. Aucune augmentation de la mortalité et aucune perte de poids n’ont été détectées chez les souris co-infectées immunisées contre l’IAV par rapport aux souris co-infectées sans immunité préexistante. Ces résultats suggèrent que les manifestations sévères associées à la co-infection ne sont pas dues à une maladie plus sévère du SRAS-CoV-2 mais à l’IAV.
Implications
Cette étude montre que la co-infection par l’IAV et le SARS-CoV-2 provoque une maladie grave et mortelle chez la souris. Les manifestations graves présentées par les souris co-infectées étaient associées à une induction robuste de l’immunité innée, à une charge virale IAV élevée et à une pathologie intensifiée du système respiratoire.
L’immunité humorale antérieure contre la grippe, mais pas le SRAS-CoV-2, a stoppé la progression vers une maladie grave et une mortalité, ce qui suggère que l’immunité contre la grippe acquise via la vaccination peut être un outil précieux pour réduire le risque de co-infection grave de la grippe et du SRAS-CoV-2.