Dans un article récent publié dans Natureles chercheurs ont conçu une étude transversale pour étudier les fondements biologiques du « Long COVID » (LC), le syndrome d’infection post-aiguë (PAIS) déclenché par le coronavirus 2 du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS-CoV-2).
Sommaire
Arrière-plan
De nombreuses infections microbiennes et virales conduisent au développement de PAIS, ce qui implique qu’elles sont omniprésentes. Certains ont été étudiés de manière approfondie, comme l’encéphalomyélite myalgique/syndrome de fatigue chronique (EM/CFS), mais la biologie fondamentale qui sous-tend le développement du PAIS reste floue.
Comme la guérison de la maladie à coronavirus 2019 (COVID-19) varie d’une personne à l’autre (hétérogène), chez certaines personnes convalescentes, ses symptômes peuvent persister pendant une durée prolongée, se manifestant par une CL.
La LC présente une constellation de symptômes débilitants, tels que la fatigue et les déficits cognitifs ; de plus, sa prévalence est élevée. Certaines études prospectives suggèrent qu’une personne sur huit atteinte de COVID-19 présente des symptômes persistants, probablement parce que des restes viraux dans les tissus activent l’auto-immunité ou provoquent une dysbiose microbienne. Dans certains cas, l’inflammation chronique provoque des lésions tissulaires.
À propos de l’étude
Dans la présente étude, les chercheurs ont créé cinq groupes en utilisant les 273 participants de l’étude de cohorte Mount Sinai Yale Long COVID (MY-LC) à New York, aux États-Unis d’Amérique (USA), comme suit :
i) les travailleurs de la santé infectés par le SRAS-CoV-2 avant la vaccination (HCW) ;
ii) témoins vaccinés (HC) non infectés par le SRAS-CoV-2 (sains), démographiquement appariés ;
iii) les personnes précédemment infectées et vaccinées sans symptômes persistants, c’est-à-dire les témoins de convalescence (CC) ;
iv) les personnes présentant des symptômes persistants après une infection aiguë par le SRAS-CoV-2 (Long COVID, LC) ; et
v) un autre groupe d’individus présentant des symptômes persistants après une infection aiguë provenant d’une autre étude (LC externe).
Ils ont utilisé l’immunophénotypage multidimensionnel et l’apprentissage automatique (ML) impartial pour identifier les biomarqueurs potentiels de LC dans les données regroupées des cinq cohortes. Le suivi de l’étude a duré plus de 12 mois.
Résultats
Les résultats de l’étude ont mis en évidence des différences immunologiques marquées entre les populations LC et témoins ; par exemple, les personnes atteintes de LC présentaient des populations de cellules immunitaires altérées dans la circulation sanguine périphérique.
Alors que le nombre de monocytes, de lymphocytes B double-négatifs et de lymphocytes T CD4 sécrétant de l’interleukine (IL)-4/6 augmentait chez les personnes atteintes de LC, celui des cellules dendritiques (DC)1 et des lymphocytes T CD4 à mémoire centrale avait diminué, ce qui sont responsables de la présentation des antigènes et de l’amorçage des lymphocytes T cytotoxiques. De plus, le liquide céphalo-rachidien (LCR) provenant d’individus atteints de LC présentait plus d’immunoglobulines T et de domaines ITIM (TIGIT) + CD8 + T, ce qui indique un possible épuisement immunitaire.
À l’inverse, les autoanticorps dirigés contre l’exoprotéome humain ne différaient pas significativement entre LC et les témoins. Ainsi, la question de savoir si les lymphocytes T autoréactifs jouent un rôle dans la pathogenèse de la LC nécessite des recherches futures.
De plus, les personnes atteintes de LC présentaient plus d’anticorps contre le SRAS-CoV-2, le virus varicelle-zona (VZV) et en particulier les antigènes du virus Epstein-Barr (EBV). D’autres études ont montré que la virémie à l’EBV survient chez les patients hospitalisés en raison du COVID-19 ; ainsi, il semble être un prédicteur indépendant du développement ultérieur de symptômes persistants. Des IgG élevées contre les antigènes lytiques de l’EBV suggèrent que la réactivation des herpèsvirus latents pourrait être une caractéristique courante de la LC.
En outre, les auteurs ont noté des différences substantielles dans les niveaux de cytokines et d’hormones circulantes, en particulier de cortisol, chez les participants des cohortes MY-LC et LC externe. Des niveaux de cortisol constamment inférieurs chez les patients atteints de LC plus d’un an après une infection aiguë justifient des investigations plus approfondies, bien que certaines études aient associé une diminution des niveaux de cortisol au cours des premières phases du COVID-19 avec le développement de symptômes respiratoires de LC.
Les participants atteints de LC provenant de deux sites présentaient des niveaux de cortisol systémique nettement inférieurs ; cependant, cela n’a pas été associé à une exacerbation compensatoire des taux d’hormone adrénocorticotrope (ACTH), ce qui suggère que la LC a probablement atténué la réponse de l’axe hypothalamo-hypophysaire pour réguler le cortisol. L’ACTH ayant une demi-vie extrêmement courte dans le plasma, de futures études devraient confirmer ces résultats préliminaires.
Des modèles ML impartiaux ont détecté des cibles potentielles pour le développement futur de biomarqueurs LC après avoir fait correspondre la LC et les contrôles afin de minimiser la confusion due au sexe, à l’âge et au statut vaccinal. De plus, les auteurs ont montré que les résultats rapportés par les patients et les analyses immunologiques étaient hautement concordants dans les diagnostics de LC.
Conclusions
Pour résumer, la présente étude distingue remarquablement les différences biologiques entre les participants atteints de LC et les témoins appariés et les travailleurs de la santé. Ainsi, les futures recherches sur les fondements immunologiques de la LC doivent se poursuivre.