Des chercheurs de l’Université de Durham, de l’Université Jagellonne (Pologne) et du Centre John Innes ont réalisé une percée dans la compréhension de l’ADN gyrase, une enzyme bactérienne vitale et une cible antibiotique clé.
Cette enzyme, présente chez les bactéries mais absente chez l’homme, joue un rôle crucial dans le superenroulement de l’ADN, processus nécessaire à la survie bactérienne.
Grâce à la microscopie cryoélectronique à haute résolution, les chercheurs révèlent des détails sans précédent sur l'action de la gyrase sur l'ADN, ouvrant potentiellement la porte à de nouvelles thérapies antibiotiques contre les bactéries résistantes.
La recherche est publiée dans Actes de l'Académie nationale des sciences (PNAS).
L’ADN gyrase fonctionne comme une minuscule machine moléculaire, tordant et stabilisant soigneusement l’ADN bactérien. Cette torsion, connue sous le nom de super-enroulement, est similaire à l’enroulement d’un élastique : à mesure qu’il se tord, il s’enroule de plus en plus serré.
Contrairement à une bande qui se déroulerait si elle était libérée, l'ADN gyrase stabilise la forme tordue de l'ADN, le rendant ainsi fonctionnel pour les bactéries.
L'enzyme enveloppe l'ADN dans une boucle en forme de huit, puis brise et fait passer les brins les uns dans les autres avec précision, les refermant ensuite. Il s'agit d'un processus délicat : si l'ADN restait brisé, il serait mortel pour la bactérie.
Les antibiotiques tels que les fluoroquinolones exploitent cette vulnérabilité en empêchant la refermeture de l'ADN, qui tue la cellule bactérienne. Cependant, la résistance à ces antibiotiques augmente, il est donc urgent de mieux comprendre le fonctionnement du gyrase.
À l’aide d’une microscopie cryoélectronique de pointe, l’équipe a capturé un instantané de la gyrase au travail, révélant comment elle enveloppe l’ADN dans des bras protéiques tendus pour former la forme en huit.
Cette découverte met à jour la vision conventionnelle du mécanisme de la gyrase, étudiée depuis des décennies. Les images montrent l’enzyme comme un système en plusieurs parties hautement coordonné, chaque pièce se déplaçant dans une séquence précise pour obtenir un super-enroulement de l’ADN.
Les résultats suggèrent que la position exacte et l'ordre des pièces mobiles complexes de l'enzyme pendant le processus de superenroulement n'étaient pas tout à fait comme nous le pensions auparavant, et cela pourrait avoir un impact sur la façon dont nous concevons de nouveaux inhibiteurs.
Jonathan Heddle, professeur, Université de Durham
Cette découverte fait non seulement progresser nos connaissances sur la biologie bactérienne, mais est également prometteuse pour de nouveaux antibiotiques conçus pour bloquer la gyrase de manière plus ciblée, en contournant les mécanismes de résistance existants.
Avec cette structure à haute résolution comme guide, les chercheurs visent à prendre des instantanés supplémentaires de l’enzyme à différentes étapes, créant ainsi un film moléculaire sur le fonctionnement de la gyrase.
Cette approche détaillée pourrait contribuer au développement d’antibiotiques de nouvelle génération plus précis et plus efficaces pour stopper les infections bactériennes.