Sommaire
Le problème de santé
La dépression est un trouble mental courant et persistant. Elle a pour symptômes la tristesse, la perte d’intérêt et de plaisir, une faible estime de soi, un sentiment de culpabilité, des troubles du sommeil et de l’appétit. Près de trois cent cinquante millions de personnes souffraient d’une dépression dans le monde en 2012, avec une morbidité et une mortalité importante. Le nombre d’années de vie perdues en incapacité se situait en 2013 autour de six cent seize millions pour un trouble dépressif modéré, et de cinquante-deux millions pour un trouble majeur. Entre 1990 et 2013, l’augmentation de ces deux types de dépression a été de 53 %, chiffre qui témoigne d’une maladie se répandant dangereusement. La France compte désormais 7,8 % de personnes dépressives chez les quinze/soixante-quinze ans. Les raisons sont multifactorielles : violence sexuelle ou physique, problèmes parentaux ou inter-parentaux, perte d’emploi, précarité, solitude, maladie… Pour traiter cette maladie, les médicaments antidépresseurs peuvent aider mais ne sont pas toujours la solution en raison de leur efficacité limitée et de leurs effets secondaires.
L’étude de référence
Une méta-analyse a voulu vérifier l’efficacité de programmes d’activités physiques adaptées chez les personnes touchées par une dépression, en excluant celle liée à un accouchement. À partir de trente-sept essais randomisés, elle confirme un effet antidépresseur significatif à court et moyen terme. Vingt-neuf essais ont rapporté l’acceptabilité de l’INM, et quatre l’ont comparée à un traitement pharmacologique, sans trouver de différence significative.
Descriptif de la méthode
Le programme antidépresseur d’activité physique adaptée devrait comporter au moins trois séances supervisées par semaine durant trois mois et ne pas être exclusivement composé d’exercices d’endurance. Il les combine à des exercices de renforcement musculaire et de coordination motrice, dans une perspective ludique, introspective, expressive et de maîtrise de soi. Contrairement à l’INM anti-obésité visant une dépense énergétique accrue, celle-ci cherche à reconstruire un corps vecteur de plaisir et d’expression de soi. Le travail sur la respiration, la relaxation et le vécu du temps présent est déterminant. Une progression lente et individualisée est proposée, avec des points de repère vers un but à atteindre.
Les mécanismes d’action
Les effets antidépresseurs de ce programme d’activité physique spécifique ne reposent pas sur un mécanisme unique. Aucun auteur ne propose d’ailleurs de théorie explicative complète. Des modèles physiologiques signalent un meilleur apport d’oxygène au cerveau. D’autres, neurobiologiques, suggèrent différentes options : activation de la neurogenèse dans l’hippocampe (processus de formation de neurones à partir de cellules souches) ; régulation de la libération de cortisol (hormone) et de sérotonine (molécule modulant la communication entre les neurones) ; stimulation des voies d’endorphine (hormone généralement secrétée en période de stress ou d’effort) ; facilitation du circuit de la récompense (système neurologique des voies du plaisir). Sont également mentionnées une modification des niveaux de conscience, notamment du corps (sensorialité, corps plaisir, corps expressif), et une amélioration des fonctions exécutives telles que la planification, la coordination, la focalisation et les capacités d’apprentissage. Au niveau cognitif, les chercheurs optent pour une meilleure régulation du stress et une diversion des pensées négatives. Enfin, des modèles psychosociologiques tablent sur une amélioration du sentiment d’efficacité personnelle, du regard sur les compétences physiques, de l’estime de soi et de la participation sociale.
Bénéfices
L’effet de ce type de programmes chez des patients dépressifs est confirmé par d’autres méta-analyses, les taux de rémission (41 %) étant similaires à ceux d’une thérapie cognitivo-comportementale (36 %) et d’un médicament antidépresseur (42 %). Notons aussi que deux essais randomisés montrent une diminution des symptômes dépressifs avec cette INM chez des patients résistants aux médicaments. Une autre étude constate des résultats équivalents à un traitement médicamenteux seul ou en combinaison, mais chez les patients en rémission à la fin du traitement, les participants du groupe exercice ont un taux de récidive plus faible que ceux de tous les autres groupes traités avec des médicaments, après six mois de suivi. Les auteurs en concluent que l’ajout d’un médicament antidépresseur au programme n’apporte pas de meilleurs résultats sur la prévention des récidives d’épisode dépressif.
Quels sont les risques ?
Il n’existe pas de risque majeur mentionné dans les études dont les programmes respectent la progressivité des efforts et les conditions normales de sécurité relatives à la pratique d’activité physique. Plusieurs ont toutefois signalé des blessures musculaires mineures et une majoration de la fatigue chez certains patients. Le risque d’abandon d’une pratique physique régulière est un facteur de récidive, d’où l’importance de trouver des soutiens motivationnels pour maintenir une activité d’au moins trente minutes par jour (objet connecté, association de patients, soutien téléphonique, suivi médical). Le bénéfice est démontré chez des patients ayant déjà une maladie chronique (maladie cardiaque, cancer du sein, broncho-pneumopathie chronique obstructive), mais pas en cas de problème rénal, d’AVC ou de diabète de type 2.
Conseils pratiques
Compte tenu de ses bénéfices et de ses faibles risques, cette INM de trois mois doit être considérée par un médecin traitant comme une solution de première intention à prescrire pour les dépressions d’intensité légère à modérée. L’association à d’autres traitements médicamenteux et psychothérapeutiques est néanmoins indispensable pour les dépressions sévères, autant que le recours à un psychiatre.
À qui s’adresser ?
Un médecin qui prescrira l’INM et un enseignant en activité physique adaptée formé pour appliquer cette thérapie.
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