Lorsqu'il s'agit de jongler avec la technologie numérique pour le travail et la famille, les femmes sont plus exposées que les hommes au risque de « surcharge numérique », selon une nouvelle étude menée par l'Université de Lancaster.
L’étude, qui a des implications importantes sur la répartition inégale du travail numérique entre les sexes, souligne que les femmes sont plus susceptibles que les hommes d’utiliser fréquemment les technologies de l’information et de la communication (TIC) tant dans leur vie professionnelle que familiale.
Ce « double fardeau numérique » travail-famille accroît le risque potentiel de « surcharge numérique et d’épuisement professionnel » pour les femmes.
La nouvelle recherche, dirigée par le professeur Yang Hu, de l'Université de Lancaster, en collaboration avec le professeur Yue Qian de l'Université de Colombie-Britannique au Canada, examine le genre et le travail numérique dans 29 pays et est publiée dans la revue « Community, Work & Family ».
Le travail numérique implique l’utilisation d’une gamme diversifiée d’outils et de plateformes numériques, tels que Zoom et WhatsApp, pour accomplir le travail quotidien et les tâches domestiques.
Alors que la pandémie a considérablement accéléré les progrès de la numérisation, les gens utilisent de plus en plus et largement les TIC pour la communication professionnelle et familiale après le COVID-19.
L'utilisation fréquente des TIC demande du temps et des efforts, et constitue donc une nouvelle forme de travail. Notre étude a examiné les inégalités entre les sexes dans l'exécution de ce travail numérique.
Yang Hu, professeur, Université de Lancaster
L'étude transnationale utilise les dernières données de l'Enquête sociale européenne et examine comment les gens maintiennent la communication numérique pour le travail et la famille dans 29 pays (dont le Royaume-Uni).
Ils ont limité l'échantillon à 6 654 répondants actifs âgés de 30 à 59 ans qui ont au moins un enfant (âgé de 12 ans ou plus) et au moins un parent vivant, afin d'examiner l'utilisation des TIC par les répondants à la fois pour le travail et la famille.
Ils ont trouvé :
- Un « double fardeau numérique » distinctif entre travail et famille : les femmes sont 1,6 fois plus susceptibles que les hommes de jongler avec une double communication numérique au travail et à la maison.
- La division traditionnelle du travail entre les sexes dans la vie professionnelle et familiale s'étend à l'exécution du travail numérique : les femmes sont 31 % moins susceptibles que les hommes d'avoir une communication numérique élevée uniquement liée au travail, mais elles sont 2,6 fois plus susceptibles que les hommes d'avoir une communication numérique élevée uniquement liée à la famille.
- Au Royaume-Uni, 42 % des répondants ont une double communication numérique moyenne-élevée entre travail et vie familiale, ce qui est inférieur à la moyenne de 48 % dans les 29 pays étudiés. Les répondants britanniques sont donc moins accablés par la double tâche numérique (communicationnelle) dans la vie professionnelle et familiale que les répondants de Norvège (59 %), d'Espagne (54 %) et de Serbie (65 %), par exemple.
- Les répondants britanniques ont l’une des proportions les plus élevées de communications numériques exclusivement professionnelles, 30 % d’entre eux ayant un niveau élevé de travail numérique (communication) uniquement pour le travail mais pas dans la vie familiale. C’est l’un des taux les plus élevés parmi les 29 pays étudiés (seulement après les 31 % d’Israël).
« Les décideurs politiques, les éducateurs et les praticiens investissent massivement dans le renforcement des capacités numériques à l’échelle mondiale dans de nombreuses sociétés », a déclaré le professeur Hu.
« Nos résultats montrent que parmi les personnes ayant un niveau élevé de culture numérique et dans les pays où les gens utilisent Internet plus intensément, les femmes sont particulièrement plus susceptibles que les hommes de souffrir du « double fardeau numérique ».
La professeure Qian a ajouté : « Ces résultats encouragent les décideurs politiques, les éducateurs et les praticiens à intégrer les considérations d'égalité des sexes dans leurs efforts de renforcement des capacités numériques. Les progrès des femmes en matière de culture numérique ne doivent pas se faire au détriment de leur lourde charge numérique dans leur vie professionnelle et familiale. »
Suite à la pandémie, le travail à domicile se généralise.
Les résultats de l’étude montrent également que le travail fréquent à domicile exacerbe le « double fardeau numérique » qui pèse de manière disproportionnée sur les épaules des femmes.
Si le travail à domicile offre aux travailleurs la flexibilité de jongler entre leurs responsabilités professionnelles et familiales, il devient également un nouveau lieu crucial d’inégalité entre les sexes dans le travail numérique.