Dans une étude récente publiée dans Rapports scientifiques, un groupe de chercheurs a évalué la durabilité de divers régimes alimentaires basés sur des sources de protéines, en tenant compte des aspects environnementaux, sanitaires, économiques et nutritionnels. L’étude a utilisé les données d’une large cohorte française.
Étude: La nature de l’apport protéique comme facteur discriminant de la durabilité de l’alimentation : une approche multicritère. Crédit d’image : Creative Cat Studio/Shutterstock.com
Arrière-plan
Alors que les crises environnementales s’intensifient et que les efforts visant à atteindre l’objectif de 1,5 °C de l’Accord de Paris échouent, la nécessité de repenser les systèmes alimentaires mondiaux devient cruciale, compte tenu de leur contribution substantielle aux émissions de gaz à effet de serre (GES).
La richesse entraîne une évolution vers des régimes alimentaires riches en calories et en protéines, historiquement alimentés par l’accent centré sur les protéines remontant aux années 1930 et propulsés par les marchés lucratifs de la production animale.
Malgré les risques sanitaires reconnus et les émissions élevées des aliments d’origine animale, les habitudes alimentaires occidentales restent largement inchangées, éclipsant le marché émergent des alternatives à base de plantes.
Des recherches plus approfondies sont cruciales car les tendances alimentaires actuelles, fortement influencées par le débat en évolution sur les « protéines » et la consommation croissante de viande, ne sont pas durables dans le contexte des objectifs climatiques et de la santé publique, nécessitant une analyse multidimensionnelle, incluant des facteurs économiques souvent négligés.
À propos de l’étude
La présente étude a exploité les données de la cohorte NutriNet-Santé, en se concentrant sur les liens entre l’alimentation, la nutrition et l’activité physique et la santé. Les participants, tous adultes utilisant Internet en France, ont fourni des informations via des questionnaires réguliers, notamment sur leur mode de vie et leurs habitudes alimentaires. L’étude est conforme aux normes éthiques et le consentement des participants a été obtenu.
La consommation alimentaire a été analysée à l’aide d’un questionnaire sur la fréquence des aliments biologiques (Org-FFQ), englobant 23 groupes d’aliments en fonction de leur teneur en protéines. Les valeurs nutritionnelles ont été extraites d’un tableau de composition alimentaire spécifique.
L’impact environnemental a été évalué à l’aide de l’outil DIALECTE et du score ReCiPe, en tenant compte de facteurs tels que les émissions de gaz à effet de serre et l’utilisation des terres.
La qualité nutritionnelle a été évaluée à travers trois indices alimentaires : l’indice de qualité de l’alimentation basé sur la probabilité d’un apport nutritionnel adéquat (PANDiet), le score 2 des lignes directrices du programme national nutrition santé (PNNS-GS2) et l’indice global de qualité de l’alimentation (cDQI).
Les risques pour la santé ont été évalués via un « Health Risk Score (HRS) », reflétant le risque de décès lié aux habitudes alimentaires. Les données économiques englobaient les revenus et les dépenses alimentaires des participants.
Dans la cohorte, 29 210 personnes ont été sélectionnées en fonction de la disponibilité et de l’exactitude des données. L’étude a utilisé une procédure en deux étapes pour identifier des groupes d’individus possédant des sources de protéines similaires.
Ces groupes ont ensuite été examinés et comparés sur la base de caractéristiques sociodémographiques, de consommation alimentaire et d’autres indicateurs sanitaires et économiques.
L’analyse statistique a utilisé des modèles d’analyse de covariance (ANCOVA) à des fins de comparaison, les résultats indiquant des variations dans les structures des dépenses alimentaires et protéiques d’une grappe à l’autre.
Résultats de l’étude
L’étude s’est concentrée sur une population principalement composée de femmes, soit 75 %, avec un âge moyen de 54 ans, révélant des données fascinantes sur les typologies de sources de protéines et leurs implications pour la santé, l’environnement et l’économie.
L’analyse du régime alimentaire des participants a identifié cinq groupes distincts en fonction de leurs habitudes de consommation de protéines. Le cluster à base de lait, regroupant 17 % des sujets, préférait le lait et les boissons comme le café et le thé. Le cluster viande, représentant 26 %, consommait principalement plus de viande rouge, de volaille et de viande transformée.
Le cluster basé sur la restauration rapide, le plus important avec 29 %, penchait vers la restauration rapide, les céréales et les produits gras et sucrés. Les groupes à base de poisson sain et à base de plantes saines, respectivement à 25 % et à peine 3 %, privilégiaient les fruits de mer et les protéines d’origine végétale comme le soja, les légumineuses, les noix et les fruits et légumes.
Une analyse approfondie de leurs habitudes alimentaires a révélé des apports en protéines allant de 67 g/j dans le groupe des viandes à 99 g/j chez les amateurs de viande, avec une consommation de protéines végétales aussi faible que 25 g/j dans le groupe des viandes et jusqu’à 53 g/j dans la grappe végétale.
L’analyse de la qualité nutritionnelle a montré que le cluster à base de plantes obtenait les scores les plus élevés en termes d’indices de qualité nutritionnelle (PNNS-GS2 et PANDiet), reflétant le respect des directives nutritionnelles.
En revanche, le groupe à base de poisson a dépassé le score cDQI, indiquant un équilibre dans la qualité des aliments d’origine animale et végétale consommés. En revanche, le groupe à base de viande a obtenu le score le plus faible, mettant en évidence de potentielles carences nutritionnelles.
Du point de vue du risque pour la santé, le groupe à base de plantes était le plus bénéfique, avec le HRS le plus faible, tandis que le groupe à base de viande présentait le risque le plus élevé. Il a été noté qu’un régime pauvre en céréales complètes et en légumineuses et riche en viande rouge contribuait de manière significative à un HRS plus élevé.
L’évaluation de l’impact environnemental a révélé que le régime alimentaire à base de plantes avait l’empreinte environnementale la plus faible, tandis que le régime alimentaire à base de viande présentait l’impact le plus important.
Il est intéressant de noter que la consommation d’aliments biologiques était plus répandue dans les groupes à base de plantes et de poisson sain, avec une baisse notable dans les groupes à base de viande et de lait.
L’analyse économique a révélé que les individus appartenant au groupe des consommateurs de plantes saines consacraient une plus grande partie de leurs revenus à l’alimentation, privilégiant souvent les produits biologiques, contribuant ainsi à des dépenses alimentaires globales plus élevées. En revanche, ceux du groupe à base de viande disposaient d’un budget inférieur pour les aliments biologiques.
En ce qui concerne les dépenses en protéines, le cluster à base de viande a dépensé le plus, tandis que le cluster à base de plantes a dépensé le moins, se concentrant souvent sur les noix comme sources de protéines.
Ces résultats soulignent la diversité des modèles alimentaires et mettent en évidence l’interdépendance du régime alimentaire avec les résultats sanitaires, environnementaux et économiques.