Comprendre comment le GLP-2 contrôle l’appétit pourrait ouvrir la voie à de nouvelles stratégies de lutte contre l’obésité, offrant l’espoir de traitements plus efficaces.
Étude : L'implication possible du peptide de type glucagon-2 dans la régulation de la prise alimentaire via l'axe intestin-cerveau. Crédit photo : Pixel-Shot / Shutterstock
Dans une étude récente publiée dans la revue Nutrimentsles chercheurs ont exploré le rôle potentiel du peptide de type glucagon-2 (GLP-2) dans la régulation de l'apport alimentaire par sa modulation de l'activité motrice gastro-intestinale et des signaux de satiété périphériques via l'axe intestin-cerveau.
Sommaire
Arrière-plan
La régulation du cycle faim-satiété implique des interactions complexes entre les signaux centraux et périphériques, principalement intégrés dans l'hypothalamus, en particulier dans le noyau arqué. Deux populations neuronales du noyau arqué – le neuropeptide Y (NPY)/protéine apparentée à l'agouti (AgRP) (orexigène) et la pro-opiomélanocortine (POMC)/transcrit régulé par la cocaïne et l'amphétamine (CART) (anorexigène) – répondent aux signaux du tissu adipeux, du pancréas et de l'intestin, influençant l'apport alimentaire et l'équilibre énergétique. Les hormones intestinales comme le GLP-1, la cholécystokinine (CCK) et le peptide YY (PYY) affectent les mécanismes centraux et périphériques, notamment l'activité motrice gastrique, pour réguler la satiété.
Les effets centraux et périphériques du GLP-2 jouent un rôle important dans son impact global sur la prise alimentaire. Alors que les effets anorexigènes centraux du GLP-2 sont principalement médiés par son action sur la voie hypothalamique de la mélanocortine, ses effets périphériques sur la motilité gastrique et l'absorption des nutriments influencent davantage la satiété. La compréhension de ce double mécanisme est essentielle pour développer des interventions thérapeutiques.
Des recherches supplémentaires sont nécessaires pour comprendre pleinement les mécanismes par lesquels le GLP-2 influence l’activité motrice gastro-intestinale et son rôle potentiel dans la régulation de l’apport alimentaire, ce qui pourrait conduire à de nouvelles approches thérapeutiques pour l’obésité.
Représentation schématique des principaux mécanismes par lesquels les hormones intestinales peuvent influencer les structures hypothalamiques pour induire des effets anorexigènes. Lignes violettes (circulation sanguine) ; lignes vertes (fibres nerveuses) ; et EEC (cellules entéroendocrines).
Axe intestin-cerveau et signaux de satiété
Les hormones dérivées de l’intestin peuvent influencer la prise alimentaire par divers mécanismes. L’une des voies principales implique le nerf vague, où des récepteurs situés dans la muqueuse intestinale activent les fibres afférentes vagales. Ces signaux voyagent jusqu’à l’hypothalamus via le noyau du tractus solitaire (NTS). Les hormones comme le GLP-1, le CCK et le PYY sont bien connues pour leurs effets sur la motilité gastro-intestinale et la génération ultérieure de signaux de satiété. La vidange gastrique et l’accommodation gastrique sont deux processus clés impliqués dans ces signaux. Une vidange gastrique plus lente, par exemple, augmente la satiété en prolongeant la présence de nourriture dans l’estomac, une caractéristique fréquemment observée chez les personnes obèses ayant des taux de vidange plus rapides.
En revanche, les effets du GLP-2 sur la prise alimentaire sont modulés à la fois de manière centrale, par l'activation du récepteur de la mélanocortine 4 (MC4-R), et de manière périphérique, en retardant la vidange gastrique via les voies afférentes vagales. Cette double modulation suggère que le GLP-2 pourrait agir comme un régulateur bidirectionnel au sein de l'axe intestin-cerveau, influençant la prise alimentaire par des mécanismes à la fois centraux et périphériques.
GLP-2 : origine et fonction
Le GLP-2 est un peptide de 33 acides aminés produit principalement dans les intestins par les cellules L (cellules intestinales qui libèrent des hormones pour réguler la digestion et l'appétit) et est également exprimé dans le cerveau. Le GLP-1 et le GLP-2 sont tous deux dérivés de la protéine proglucagon. Alors que le GLP-1 est mieux connu pour son rôle dans la promotion de la satiété et l'amélioration de la sécrétion d'insuline, le rôle du GLP-2 dans la modulation de la motilité gastro-intestinale et la promotion de la croissance intestinale est également important. Contrairement au GLP-1, la demi-vie du GLP-2 est brève en raison de la dégradation rapide par l'enzyme dipeptidyl peptidase IV (DPP-IV). Ainsi, des analogues du GLP-2 résistants à la DPP-IV ont été développés à des fins thérapeutiques, en particulier dans le traitement du syndrome de l'intestin court (SBS).
L’interaction entre le GLP-2 et le microbiote intestinal est un autre domaine d’intérêt émergent. Des recherches récentes suggèrent que le microbiote intestinal peut influencer la sécrétion de GLP-2, affectant ainsi indirectement l’apport alimentaire. Cette relation souligne le potentiel des thérapies ciblant le microbiote à moduler les niveaux de GLP-2 et, par conséquent, à réguler l’appétit et l’équilibre énergétique.
GLP-2 et motilité gastro-intestinale
Il a été démontré que le GLP-2 a un impact sur la motilité du tractus gastro-intestinal. Dans des études sur des animaux, l'administration de GLP-2 a entraîné un retard de la vidange gastrique et une réduction de la motilité antrale, ce qui contribuerait à une augmentation de la satiété et à une réduction de l'apport alimentaire. Cet effet est probablement médié par le système nerveux central, notamment par l'activation du récepteur de la mélanocortine 4 (MC4-R). De plus, le nerf vague pourrait jouer un rôle, car des récepteurs GLP-2 ont été trouvés sur des neurones afférents vagaux, suggérant une voie par laquelle les signaux GLP-2 peuvent affecter la régulation de l'apport alimentaire.
Résultats contradictoires dans la recherche sur le GLP-2
Malgré ces résultats prometteurs, les recherches sur le GLP-2 ont produit des résultats contradictoires, en particulier chez l’homme. Si certaines études animales démontrent une suppression significative de l’appétit et un retard de la vidange gastrique après l’administration de GLP-2, des effets similaires n’ont pas été systématiquement observés dans les essais sur l’homme. L’administration périphérique de GLP-2 chez des individus sains n’a montré aucun impact significatif sur l’appétit ou la satiété postprandiale, ce qui souligne la nécessité de poursuivre les recherches sur les mécanismes d’action et les applications thérapeutiques potentielles du GLP-2 dans les populations humaines.
GLP-2 et le système nerveux entérique
Le GLP-2 affecte également le système nerveux entérique en modulant la neurotransmission inhibitrice et excitatrice. Le peptide induit une relaxation gastrique en augmentant la libération d'oxyde nitrique (NO) et de peptide intestinal vasoactif (VIP), deux neurotransmetteurs inhibiteurs majeurs. Ces neurotransmetteurs provoquent une relaxation des muscles lisses du tractus gastro-intestinal, ralentissant la motilité et contribuant à retarder la vidange gastrique. Cela pourrait expliquer pourquoi le GLP-2, bien qu'il favorise l'absorption des nutriments, peut néanmoins jouer un rôle dans la réduction de l'apport alimentaire en allongeant le temps de transit gastrique.
Le rôle du microbiote intestinal dans la fonction du GLP-2
Outre ses effets directs sur la motilité gastro-intestinale, l'interaction du GLP-2 avec le microbiote intestinal joue un rôle crucial dans son impact global sur l'apport alimentaire et l'homéostasie énergétique. Il a été démontré que les altérations de la composition du microbiote intestinal affectent la sécrétion de GLP-2, influençant ainsi la libération d'hormones anorexigènes et modifiant les signaux de satiété. Cette relation suggère que cibler le microbiote intestinal pourrait être une stratégie viable pour améliorer le potentiel thérapeutique du GLP-2, en particulier dans la gestion de l'obésité et des troubles métaboliques associés.
Le double rôle du GLP-2 dans l’absorption des nutriments et la satiété
L’un des aspects intéressants du GLP-2 est son double rôle dans l’amélioration de l’absorption des nutriments et la promotion de la satiété. D’une part, le GLP-2 favorise la croissance et la réparation de la muqueuse intestinale et facilite l’absorption des nutriments, en particulier du glucose, des acides gras et des acides aminés. D’autre part, il supprime la prise alimentaire en ralentissant la vidange gastrique et en augmentant la satiété. Ces deux rôles peuvent sembler contradictoires, mais la modulation des signaux de satiété et le temps de digestion prolongé pourraient offrir un mécanisme équilibré dans l’homéostasie énergétique.
Le potentiel thérapeutique du GLP-2
Le rôle du GLP-2 dans la régulation de la prise alimentaire et de la motilité gastro-intestinale constitue une cible thérapeutique potentielle pour des pathologies telles que l'obésité. Bien que les analogues du GLP-1 soient déjà utilisés dans le traitement de l'obésité, la capacité du GLP-2 à influencer la signalisation intestin-cerveau et à retarder la vidange gastrique pourrait compléter ces thérapies. Dans des études précliniques, il a été démontré que le GLP-2 supprime l'appétit et retarde la vidange gastrique chez les animaux, mais des effets similaires n'ont pas été démontrés de manière constante chez l'homme.
Conclusion
Le GLP-2 joue un rôle multiforme dans la régulation de la prise alimentaire par ses effets sur la motilité gastro-intestinale et l'axe intestin-cerveau. Le GLP-2 pourrait contribuer au contrôle de la prise alimentaire à court et à long terme en modulant la vidange gastrique et en influençant les signaux de satiété. Cependant, les résultats contradictoires observés dans les études humaines soulignent la nécessité de poursuivre les recherches pour comprendre pleinement ses applications thérapeutiques potentielles. Son potentiel thérapeutique pour l'obésité et les troubles métaboliques associés justifie des recherches plus approfondies. Le double rôle du peptide dans la promotion de l'absorption des nutriments et le contrôle de la satiété en fait un candidat prometteur pour les futurs traitements ciblant la santé métabolique. L'interaction complexe entre le GLP-2, l'axe intestin-cerveau et le microbiote intestinal ajoute un autre niveau d'intérêt à ses applications thérapeutiques potentielles.