Une découverte révolutionnaire a mis en évidence le lithium, un médicament utilisé depuis longtemps pour traiter le trouble bipolaire et la dépression, comme traitement potentiel pour les troubles du spectre autistique (TSA). Cette recherche, menée par une équipe du Centre pour les dysfonctionnements synaptiques du cerveau au sein de l'Institut des sciences fondamentales (IBS) dirigée par le directeur KIM Eunjoon, révèle que le lithium peut restaurer la fonction cérébrale et atténuer les symptômes comportementaux dans des modèles animaux de TSA causés par des mutations dans le Gène Dyrk1a.
Le TSA est un trouble neurodéveloppemental affectant 2,8 % de la population mondiale, caractérisé par des déficits sociaux, des comportements répétitifs, des défis intellectuels et de l'anxiété. Parce que les TSA imposent un lourd fardeau non seulement aux patients eux-mêmes mais aussi à leurs familles et à la société dans son ensemble, de nouvelles méthodes thérapeutiques doivent être développées pour traiter les principaux symptômes des TSA. Malgré sa prévalence, il n’existe aucun traitement définitif ni mesure préventive.
Parmi les nombreux facteurs de risque génétiques du TSA, les mutations de Dyrk1a se démarquent comme étant significatives, conduisant à des pathologies telles que le syndrome de Dyrk1a. Les patients porteurs de la mutation Dyrk1a avec perte de fonction ont présenté des troubles du spectre autistique, une microcéphalie, des problèmes de langage, un handicap social et de l'anxiété. Le modèle murin porteur de la mutation de troncature Dyrk1a I48K (une mutation de patient humain) imite également de près ces phénotypes.
L’un des mécanismes sous-jacents des symptômes des TSA dus à la mutation Dyrk1a découvert dans cette étude est l’altération des niveaux de phosphorylation de mTOR (cible mammifère de la rapamycine). Pour trouver le substrat spécifique de Dyrk1a, les chercheurs ont dû générer des souris dépourvues de la totalité de l’expression de Dyrk1a (homozygote), une condition connue pour être mortelle sur le plan embryonnaire. Cependant, en changeant le fond génétique de la souris, il a été possible de générer des animaux vivants porteurs de cette mutation. Malgré tout, le taux de survie était épouvantable, avec moins de 5 % des chiots mutants ayant survécu. Après avoir surmonté cette partie la plus difficile, les auteurs ont découvert que les niveaux de phosphorylation de divers éléments de la voie mTOR et de mTOR lui-même étaient modifiés par les niveaux d’expression de Dyrk1a.
En conséquence, ils ont choisi le lithium pour combler ce déficit et comme médicament provisoire pour guérir les souris mutantes Dyrk1a. Lorsque du lithium a été administré aux souris mutantes pendant leur période juvénile, les résultats ont été remarquables. Le lithium a normalisé la taille du cerveau, restauré la structure et la fonction des neurones excitateurs et amélioré de manière significative les comportements liés à l'anxiété et aux interactions sociales. Plus prometteur encore, les effets de ce traitement à court terme ont duré jusqu’à l’âge adulte, ce qui suggère que le lithium pourrait avoir des effets bénéfiques à long terme en permettant une récupération structurelle et fonctionnelle du cerveau.
Grâce à une analyse avancée par spectrométrie de masse, les protéines et leurs niveaux de phosphorylation sauvés par le lithium chez les souris à mutation Dyrk1a ont été largement examinés. L'équipe a découvert que les effets thérapeutiques du lithium sont en partie médiés par son action sur la Kalirin-7, une molécule essentielle à la structure et au fonctionnement synaptiques. En ciblant cette molécule, le lithium a contribué à rétablir l’équilibre des réseaux de signalisation du cerveau, abordant ainsi l’un des mécanismes fondamentaux des TSA.
Il s’agit d’une avancée passionnante. Les mutations Dyrk1a perturbent la connectivité neuronale, un peu comme un embouteillage ou des barrages routiers dans une ville. Le lithium aide à éliminer la congestion, rétablissant une communication fluide entre les neurones. »
Dr Roh Junyeop, chercheur principal et co-premier auteur de l'étude
Le directeur KIM Eunjoon a souligné l'impact potentiel de ces découvertes, déclarant : « Nos recherches montrent que le lithium, un médicament largement utilisé pour le trouble bipolaire, pourrait également servir de traitement pour les TSA. Le fait que ses effets persistent longtemps après la fin du traitement souligne l'importance d'intervention précoce pendant les fenêtres de développement critiques.
Cette étude, publiée dans la prestigieuse revue Psychiatrie Moléculaire le 5 décembre, non seulement ouvre la voie à de nouvelles approches thérapeutiques pour les TSA, mais souligne également l'importance cruciale d'un diagnostic et d'une intervention précoces. Il offre une lueur d’espoir aux familles et aux personnes touchées par le TSA, suggérant que des traitements ciblés pourraient un jour réduire le fardeau de ce trouble complexe.