Dans une étude récente publiée dans la revue Rapports scientifiquesles chercheurs ont examiné les changements dans la composition du microbiote oral dus au tabagisme.
Le tabagisme est un facteur de risque de maladies cardiovasculaires, de cancers de l’oropharynx, de parodontite et de maladies respiratoires, entre autres. Des altérations du microbiote oral ont été rapportées chez des fumeurs et des cas de parodontite, de maladies cardiovasculaires et de carcinome épidermoïde. Ainsi, les modifications du microbiote oral liées au tabagisme peuvent contribuer aux maladies chroniques. Le microbiote oral a plusieurs fonctions et est impliqué dans la voie de réduction des nitrates.
Étude : Tabagisme et microbiote salivaire : une analyse transversale d’une population alpine italienne. Crédit d’image : Lightspring/Shutterstock
Les régimes riches en nitrates augmentent l’abondance des bactéries réductrices de nitrates (NRB). On ne sait pas encore si le tabac modifie l’abondance relative du NRB. La composition du microbiote salivaire varie selon le comportement tabagique. Une méta-analyse a noté que les fumeurs avaient une augmentation des actinobactéries, une diminution des protéobactéries et une proportion réduite d’aérobies par rapport aux fumeurs n’ayant jamais fumé ou ayant déjà fumé.
Bien que les associations entre la composition du microbiote salivaire et le statut tabagique aient été caractérisées dans les populations américaines, aucune étude n’a examiné les associations entre le microbiote salivaire et le potentiel métabolique avec les années écoulées depuis l’arrêt du tabac ou l’intensité du tabagisme chez les Européens.
L’étude et les résultats
La présente étude a examiné les associations entre la composition du microbiote salivaire et le statut, les antécédents et l’intensité du tabagisme dans une cohorte italienne de 1 601 individus. Les participants étaient âgés en moyenne de 45 ans et près de 53 % de la cohorte étaient des femmes. La plupart des sujets (72 %) avaient ≥ 20 dents naturelles et 45 % étaient d’anciens ou actuels fumeurs. La principale source de tabac était la cigarette pour tous les individus sauf cinq.
Les fumeurs anciens et actuels âgés de 41 à 60 ans ayant une exposition cumulée au tabagisme plus élevée avaient moins de dents que ceux ayant une exposition plus faible. Le séquençage de l’ADN du microbiote oral à partir d’échantillons sélectionnés a donné près de 36 millions de lectures, avec 22 308 lectures médianes par échantillon. L’ensemble de données contenait 627 variantes de séquence d’amplicons provenant de 82 genres. Firmicutes et Prévotelle étaient les plus dominants au niveau du phylum et du genre, respectivement, dans la cohorte.
La composition du microbiote était associée au tabagisme, à la tranche d’âge, au sexe et au nombre de dents. Il n’y avait aucune association significative entre la diversité alpha et le statut tabagique. Les anciens fumeurs et ceux qui n’ont jamais fumé avaient une composition de microbiote très similaire. Quarante-quatre genres différaient significativement entre les fumeurs n’ayant jamais fumé et les fumeurs actuels, ajustés en fonction du nombre de dents, du sexe et de l’âge.
De plus, l’abondance relative des substances aérobies était systématiquement réduite chez les fumeurs au profit des anaérobies. Ensuite, l’équipe a trouvé une association positive entre Frétibactérie et une augmentation de l’intensité quotidienne du tabagisme (grammes de tabac par jour). De plus, neuf genres étaient différentiellement abondants entre les fumeurs actuels et ceux qui n’avaient jamais fumé.
L’abondance relative moyenne des taxons aérobies diminuait de manière significative avec l’augmentation de l’intensité du tabagisme, ajustée en fonction du nombre de dents, de l’âge et du sexe, alors que celle des anaérobies augmentait légèrement. En outre, les chercheurs ont exploré les associations entre le microbiote des anciens fumeurs et les années écoulées depuis qu’ils ont arrêté de fumer.
Le profil du microbiote des participants ayant arrêté de fumer il y a ≥ cinq ans était plus susceptible de ressembler à celui des n’ayant jamais fumé. L’abondance relative des taxons aérobies a montré une légère augmentation au cours des 20 années écoulées depuis l’arrêt du tabac. Enfin, il y avait 21 voies différentiellement abondantes entre les fumeurs jamais et les fumeurs actuels.
Conclusions
Pour résumer, l’étude a exploré les associations entre la composition du microbiote salivaire et le statut, l’intensité et le nombre d’années écoulées depuis l’arrêt du tabac dans une cohorte italienne. Les aérobies variaient selon l’intensité et la fréquence de l’exposition au tabagisme. De plus, la composition du microbiote salivaire était généralement similaire entre les anciens fumeurs et ceux qui n’avaient jamais fumé, en particulier parmi ceux qui ont arrêté de fumer il y a plus de cinq ans.
Plusieurs voies microbiennes aérobies ont été réduites chez les fumeurs, notamment les voies de synthèse de l’ubiquinol et de réduction des nitrates. De plus, les voies nécessitant de l’oxygène ou celles générant un pouvoir réducteur excessif ont été réduites, ce qui suggère que le tabagisme entraîne un environnement hypoxique dans la cavité buccale. La voie de réduction des nitrates en plus faible abondance chez les fumeurs pourrait également expliquer l’effet du tabagisme sur le risque de maladies parodontales et cardiovasculaires, qui devrait être testé dans de futures études.
Les limites de l’étude sont la conception transversale et le manque d’évaluation de la santé des gencives ou du nombre de dents manquantes, obturées ou cariées. De plus, une confusion résiduelle était possible malgré le contrôle du nombre de dents, du sexe et de l’âge en raison de la consommation d’alcool, du régime alimentaire et de la prise de médicaments. Dans l’ensemble, l’étude a révélé une association entre les modifications du microbiote salivaire et le tabagisme. Les taxons aérobies étaient les plus sensibles à l’exposition à la fumée, quelle que soit leur phylogénie. Les individus qui ont arrêté de fumer il y a cinq ans présentaient des profils de microbiote similaires à ceux des non-fumeurs.